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Maurice ATTIA


Le rouge et le brun


Paco Martinez, ancien flic passionné de cinéma, trompe son ennui en publiant des chroniques judiciaires et des critiques de cinéma au Provençal. En mars 78, à l’annonce de l’enlèvement d’Aldo Moro par les Brigades Rouges, il convainc sa rédaction de l’envoyer à Rome pour couvrir l’événement. Il y rencontre une journaliste politique à La Repubblica qui lui sert d’interprète et d’informatrice, Léa Trotski. Nous y apprenons les enjeux de cet enlèvement : alors que les leaders du Parti Communiste Italien et de la Démocratie Chrétienne s’apprêtent à réaliser le « compromis historique », homologue du programme commun en France entre PCF et PS, les révolutionnaires déçus accusent le PCI de réformisme et revendiquent des actions violentes non armées comme le fit la Gauche Prolétarienne en France. Puis leur groupe paramilitaire mène plusieurs actions violentes. Selon Berlinguer, le dirigeant du PCI, c’est la CIA qui manipule les Brigades Rouges pour empêcher une victoire de la gauche en Italie. La fin tragique d’Allende au Chili en 73 est dans tous les esprits.
Le journal et les lettres écrites par Aldo Moro pendant sa détention vont ponctuer le récit. Il comprend assez vite que le gouvernement accepte de le sacrifier au nom du principe « pas de négociation avec les terroristes ».
Victime sous ses yeux d’un accident de scooter qui lui paraît louche, Paco Martinez se met à enquêter sur les ennemis potentiels de la belle Léa. Il retrouve ainsi ce qu’il aimait dans son métier de flic : l’adrénaline, l’aventure, les surprises.

Pendant son escapade italienne, la femme de Paco, Irène, découvre dans le grenier de la maison familiale un manuscrit rédigé par son père. Il s’agit d’un récit romancé du siège du Grand Occident de France, dirigé par Jules Guérin, patron de « l’Antijuif », hebdomadaire antisémite en 1899. Irène découvre que son père détestait en silence ses grands-parents très rigides et réactionnaires. Les personnages mis en scène dans ce récit révèlent-ils des secrets de famille ? Pourront-ils l’éclairer sur les raisons de son geste, puisqu’il s’est suicidé sans laisser de piste ?

Cette double quête de vérité entremêle histoire familiale et nationale, passé et présent, fidélité et loyauté envers une femme ou envers un chef. L’auteur parvient à aborder des questions graves avec simplicité à travers des intrigues rocambolesques qui permettent d’approcher les personnages dans leur humanité. De plus, chaque nom propre donne lieu à une note en bas de page, utile pour les plus jeunes lecteurs.

Un dialogue entre Paco et son ami François également journaliste nous donne un aperçu du style :
« – J’étais flic et je ne le suis plus…
– Mais tu joues encore à l’être.
– Ça ne te manque pas l’adrénaline du terrain quand tu couvrais la French Connection ou la guerre du Kippour ?
– Bien sûr. Je te taquine. Je comprends que tu t’emmerdes dans ton boulot de journaliste.
– Journaliste ? Tu plaisantes ! Suivre des procès et voir des films, ce n’est pas du journalisme…
– Mais si ! Rédiger et témoigner des rebondissements d’un procès ou donner envie de voir ou de fuir un film, c’est du journalisme. Celui qui pratique l’investigation occupe une part mineure dans un journal.
– Sauf en temps de guerre ou de scandales politiques.
– C’est vrai mais ça demeure intermittent. C’est une bonne journaliste, ta Léa ?
– Je crois. Et elle est aussi jolie que Marina Vlady… Je suis soulagé de l’avoir connue à Rome et pas à Aix. Tu imagines ? Je voudrais aller à l’hôpital tous les jours, en secret, cacher mon chagrin ou mon anxiété. Mentir encore et encore. Prendre le risque de rencontrer des connaissances ou des voisins dans les couloirs de l’hosto. Terrible !
– Ou être lâche, espérer qu’elle y reste, ne se réveille plus, ou de la revoir qu’à sa sortie de l’hôpital…
– Quelle horreur ! On fait une belle paire de salauds, non ? »        

Nadine Dutier 
(17/03/21)    



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Noir & polar








Jigal
(Février 2021)
296 pages - 19 €


















Maurice Attia,

né à Alger en 1949, psychanalyste, psychiatre, scénariste et cinéaste, est l'auteur de plusieurs romans noirs.



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