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La page de couverture du livre s'ouvre sur le portrait d'une femme au visage énigmatique avec son abondante chevelure. Une photographie de Jeanne Duval réalisée par Nadar en 1858. Mais qui est cette Jeanne Duval ? Loin de la biographie académique, Raphaël Confiant restitue avec finesse et empathie la vie de Jeanne Duval, son enfance, sa rencontre avec Baudelaire et leurs relations tumultueuses. Tour à tour, l'auteur donne la parole à Jeanne et à Baudelaire, ainsi le lecteur, pas à pas entre dans l'univers et la vie de l'un et de l'autre. Jeanne, nous la retrouvons d'abord rue de la Femme-sans-Tête à Paris, en prise avec les préjugés "des gens à la vêture toujours soignée et au français empli de hautaineté" ainsi qu'aux interrogations du voisinage quant à son origine ; elle est "tantôt une Négresse, tantôt une Mulâtresse tantôt une Mauresque, parfois une Gitane". Jeanne nous en dira un peu plus sur son enfance en Haïti : "Ma mère, qui avait connu l'époque cruelle de Saint-Domingue et la révolte des esclaves, traitait les rustres de 'Polonyon' avec une hargne qui stupéfiait l'enfant que j'étais. Ce terme créole signifie 'Peau d'oignon' et désigne un grand général français qui, quoique de fort petite taille, s'était employé, acharné même, à mater les Nègres afin de les reconduire dans les champs de canne à sucre... Rétablir l'esclavage que 'Bespierre' avait aboli..." Jeanne veut devenir comédienne mais on ne lui confie que des rôles de soubrette. Elle survit en vendant ses charmes et c'est dans un de ces quartiers malfamés, qu'un soir où elle est malmenée par quelques "boissonniers" Baudelaire la délivrera de ses agresseurs et la conduira dans son alcôve. Dès lors, Jeanne entrera dans la vie de Baudelaire et lui inspirera nombre de poèmes : Et le lecteur accompagnera Baudelaire dans sa création poétique et sa relation tumultueuse avec Jeanne. Nous assisterons au procès des Fleurs du mal. Nous côtoierons les poètes et les écrivains proches du poète : Leconte de Lisle, Théophile Gautier, Gérard de Nerval, Flaubert, Alexandre Dumas fils... Nadar et aussi des peintres : Delacroix, Courbet, Monet (pour lequel Jeanne posera). On oublie parfois que Baudelaire fut aussi un critique d'art. Nous entrerons dans le club des haschischins où Jeanne se "métamorphose en Dorothée dans l'esprit embrumé par le haschich (Ah, cette ignoble 'confiture verte' !) et l'opium, d'un poète en quête de ce qu'il appelait la Beauté ". Nous accompagnerons Baudelaire dans son exil en Belgique... Avec sa Muse ténébreuse de Charles Baudelaire, dans un style flamboyant et des mots savoureux, Raphaël Confiant restitue merveilleusement l'univers poétique et la vie parfois sordide de Baudelaire et rend à Jeanne Duval toute sa dignité. Yves Dutier (23/03/22) * Obi : mot créole / L'obeah (parfois orthographié Obi, Obeya ou Obia) désigne un ensemble syncrétique de pratiques spirituelles, médicales et judiciaires occultes né dans les sociétés esclaves ouest-africaines des Antilles. (Wikipédia). |
Sommaire Lectures Mercure de France 272 pages - 20 € Version numérique 14,99 €
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