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David HENNEBELLE

Vers la flamme



L’auteur nous emmène en Amazonie, à la rencontre des Yanomami, un peuple autochtone de la forêt, en accompagnant Paliki, une photographe qui, au fil de plusieurs voyages, parvient à se faire accepter dans un village et s'y installer.

Comme l’indiquent les remerciements en fin d’ouvrage, le livre de David Hennebelle est une fiction sérieusement documentée grâce aux photos de Claudia Andujar (née en 1931 et dont le parcours inspire celui de Paliki) et au récit d’Alain Gheerbrant (1920-2013) qui a dirigé l'expédition Orénoque-Amazone en 1948-1950, au cours de laquelle il a pu établir un premier contact pacifique avec les Indiens Yanomami.

Paliki associe très vite ses deux passions, la photo et les voyages. « L’année 1962, elle avait fait l’acquisition d’un boitier photographique. Elle cherchait un moyen de se relier aux autres. » Elle vit dans la solitude et c’est toujours seule qu’elle parcourt plusieurs pays d’Amérique latine pour des magazines qui publient ses photos et lui confient des reportages.

En 1969, elle participe à une expédition dans le bassin du fleuve Orénoque. Le voyage en pirogue est difficile et dangereux, il faut naviguer à contre-courant, affronter de fortes pluies, subir des marches exténuantes en portant les pirogues sur les tronçons non navigables…
Enfin, ils parviennent à un campement de Yanomami, peuple autochtone de l’Amazonie 
« Paliki se dirigea vers un groupe de femmes assises à même le sol. Leur corps était enduit de motifs de couleur vermillon, leurs bras enveloppés de feuilles fraîches, assemblées en bouquets. Elles se levèrent et s'approchèrent. À tour de rôle, elles la touchèrent, enveloppant doucement sa poitrine de leurs mains. Elles riaient entre elles. Plusieurs répétaient avec un air de satisfaction awe ! napëyoma ! Paliki souriait, surprise de cette attention pressante. Leurs gestes avaient consisté à s'assurer qu'elle n'était pas un homme. Son pantalon ne laissait pas de surprendre. »
La communication n’est pas facile faute de langue commune mais les gestes et la musique suppléent en partie le manque de mots. Paliki prend des photos mais dans l’ombre de la maison commune, son flash crée la panique.

Après cette expédition, Paliki de retour à Brasilia n’a qu’une idée en tête : retourner chez les Yanomami, vivre avec eux dans la forêt.
En 1970, la fondation Guggenheim de New-York lui accorde une bourse de quinze mille dollars pour mener à terme son projet.
Surmontant tous les obstacles, la voilà repartie chez les Yanomami, nous permettant de découvrir leur quotidien, leur vie paisible très communautaire, leurs traditions, le rôle des chamans. L’un d’entre eux, Wari, a vécu quelques années auprès de missionnaires blancs installés à proximité. Il a appris le portugais et, grâce à lui, Paliki peut facilement communiquer, – poser des questions et répondre aux leurs, la curiosité étant réciproque – et apprendre leur langage.

Avec Paliki nous partageons aussi toutes les menaces et les agressions que subit le peuple Yanomami : la déforestation pour construire une route dont le chantier gigantesque sera abandonné quelques années plus tard en raison de la crise économique ; la violence des orpailleurs qui brûlent les arbres et tuent les Indiens ; les épidémies comme la rougeole transmises par les Blancs…

Paliki s’engage aux côtés des Yanomami et mène une lutte permanente pour la reconnaissance de leurs droits et la protection de leur espace.
« Des anthropologues, des ethnologues, des journalistes, d'autres photographes partageaient son indignation. Ils se réunissaient fréquemment ; ils voulaient protéger le territoire des Yanomami. Ensemble, ils écrivirent des tribunes, créèrent une association. Paliki devenait militante. »

David Hennebelle, dans ce court roman, avec une écriture claire et vive, met en scène une aventurière attachante, solitaire après une enfance compliquée, qui trouve auprès des Yanomami une raison de vivre et le moyen de donner un sens à ses passions pour la photo et le dépaysement, préférant vivre dans la forêt plutôt qu’à Brasilia où elle ne retourne que pour les obligations administratives, professionnelles et militantes. Un très beau portrait de femme et un plaidoyer efficace pour le respect des peuples autochtones.

Serge Cabrol 
(09/01/23)    



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David HENNEBELLE, Vers la flamme
Arléa

(Janvier 2023)
144 pages - 19 €













David Hennebelle,
né à Lille en 1971, est professeur agrégé et docteur en histoire. Il a publié aux éditions Autrement Mourir n’est pas de mise, 2018, Prix Georges Brassens 2018, et Je marcherai d’un cœur parfait, 2020. Vers la flamme est son troisième roman.










Pour en savoir plus
sur les Yanomami :
survivalinternational.fr/
peuples/yanomami