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Dror MISHANI


Un simple enquêteur


Dans un quartier au sud de Tel-Aviv, le commissaire Avraham Avraham, lassé d’être "un simple enquêteur" et de gérer des affaires sans envergure, rêve de missions plus ambitieuses.
Il a quarante-quatre ans et mène avec succès un travail de terrain minutieux et efficace. On parle de lui comme d’un Maigret israélien, tenace et appliqué, calme et déterminé.

Mais voilà, il voudrait autre chose et dès la première page du roman, il est justement en train d’en parler à son supérieur hiérarchique qui s’en étonne.
« – Où pensez-vous pouvoir aller à votre âge ? »
« Avraham ne le savait pas précisément, mais il espérait intégrer un service central tourné vers l'international, comme celui de la lutte contre le crime organisé ou la corruption. Et pourquoi pas une agence de renseignements ? »
« – Enfin franchement, de quoi parlez-vous ? Vous vous voyez tout à coup devenir espion ?  […] Je vais transmettre votre requête à qui de droit, je n’ai pas le choix, mais vous comprendrez que ça peut prendre des semaines, voire des mois, n’est-ce pas ? »

En attendant, Avraham retourne à son bureau pour s’occuper des signalements du jour. Il y en a eu plusieurs comme d’habitude. Un nouveau-né abandonné devant un hôpital. Un déficient mental devenu agressif. Une histoire de contrefaçon de Viagra. Un touriste qui a disparu d’un hôtel. Un enfant oublié dans une voiture et mort déshydraté…
Il envoie ses adjoints s’occuper des différentes affaires mais n’ayant plus personne à envoyer à l’hôtel d’où a disparu un touriste, il y va lui-même. C’est le directeur du Palace qui a signalé la disparition de ce touriste français depuis deux jours mais maintenant tout est arrangé, des membres de sa famille sont venus récupérer ses bagages et régler sa note, en liquide et sans pièce d’identité. En quelques questions, Avraham trouve que cette affaire, plutôt étrange, ressemblerait davantage à un enlèvement qu’a un départ volontaire. Alors il creuse… Et si le Mossad était derrière cette affaire ? À toutes ses interrogations, des réponses "venues de haut" l’engagent à laisser tomber, en présentant diverses pistes liées au grand banditisme, au trafic de drogue ou à des problèmes personnels pour expliquer cette disparition. Plus on lui conseille de s’occuper d’autre chose, plus Avraham s’entête…

Une autre affaire va se révéler plus complexe que prévu, c’est celle du bébé abandonné devant l’hôpital. Grâce aux caméras de surveillance, la femme qui a déposé le nouveau-né est identifiée. Elle s’appelle Liora Talias et l’inspectrice Esthy Wahaba est chargée de l’interroger. La confrontation entre les deux femmes se présente assez mal dès le début et va se prolonger d’interrogatoire en interrogatoire pendant tout le roman en alternance avec l’enquête d’Avraham. Liora cache un secret et se montre très agressive. Il va être question de viol et d’avortement mais Liora n’est pas la mère du bébé. On nage en plein mystère. Liora n’est pas tendre avec l’enquêtrice qui a des problèmes personnels ni avec la police d’état. À quoi bon perdre son temps et chercher midi à quatorze heures ?  « J'en ai marre de parler de ce bébé. Et puis, franchement, quel est le problème ? Vous avez retrouvé une petite fille en bonne santé, qui a été correctement prise en charge, vous n'avez qu'à la donner à une famille et c'est tout. Il y a soixante ans, vous avez vous-mêmes enlevé des bébés yéménites. Vous racontiez à leurs parents, sans que ça pose le moindre cas de conscience à personne, qu'ils étaient morts. Et après, vous les donniez à des Ashkénazes stériles, en toute légalité. C'est même l'État qui a organisé ce trafic, pour le bien des enfants, n'est-ce pas ? Et maintenant, ce serait un crime ? Vous avez récupéré un bébé, dites merci, voilà tout. »

Au fil des enquêtes, il va apparaître que le "touriste" français a une fille à Paris et que la fille de Liora Talias, adolescente impliquée dans l’affaire du nouveau-né de l’hôpital, a quitté Israël pour se réfugier à Paris. Faute de pouvoir poursuivre légalement ses investigations mettant en cause le Mossad, Avraham prend le prétexte de l’affaire d’abandon du bébé pour se rendre à Paris et rencontrer ses homologues français.

Le siège de la police criminelle n’est plus au 36 quai des Orfèvres mais Paris est tout de même la ville de Maigret… Avraham va mener les deux enquêtes de front, fouiller dans la vie de son "touriste" français, visiter sa chambre, rencontrer sa fille, multiplier les interrogatoires, tout en sachant qu’il risque gros à désobéir aux ordres qui lui intimaient de laisser tomber cette affaire.
Pourquoi s’entêter ainsi ? C’est aussi ce qu’on découvre au fil du roman.

Un simple enquêteur est le quatrième volume de la série, nous retrouverons sans doute bientôt le commissaire Avraham, son calme, sa détermination, ses doutes et son opiniâtreté, venant rejoindre la cohorte des grands héros récurrents, Maigret, Wallander, Montalbano, et autres enquêteurs du monde entier. À suivre…

Serge Cabrol 
(01/03/23)    



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Noir & polar







 Dror MISHANI, Un simple enquêteur
Gallimard / Série noire

(Janvier 2023)
352 pages - 21 €



Traduit de l'hébreu par
Laurence Sendrowicz








Dror Mishani,
né en 1975 en Israël, enseigne l’écriture créative et la fiction policière à l’Université de Tel Aviv.,
Un simple enquêteur est
la quatrième aventure
du commissaire Avraham.


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