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L’autrice de ce roman, Laura Ulonati, nous parle de Vanessa Bell, peintre, « un paysage caché derrière la célébrité de Virginia Woolf ». Car déjà, comme le dit l’autrice à travers les propos de Vanessa, « Virginia a conquis la plus vaste terre, la plus estimée dans notre famille. Celle de la parole ». Mais surtout cette dernière aura l’amour inconditionnel de leur père. Vanessa restant impuissante et nous le disant ainsi : « De toutes mes forces je veux resplendir, être bonne, utile. J’essaie d’être parfaite. J’étends mon cou, ma tête nue pour recevoir la main de mon père, mais c’est Virginia qu’il préfère. » Et aussi ce constat terrible : « Quoi que je fasse, je suis moins ». Malgré leur complicité et leur amour partagé, Virginia fera de l’ombre à Vanessa. Sœur aînée et artiste peintre, mais complice également, et qui semble accepter que le talent de Virginia domine le sien, à moins que celui-ci n’arrive pas à faire bouger les lignes ? Ou encore que son envie de vivre une vie plus « normale » de femme et de mère puisse l’empêcher de percer dans le monde de l’art ? C’est une possible interprétation de la situation, suggérée par l’autrice. Il faut alors citer ces phrases pertinentes et modernes : « La sexualité, ce grand brasier. Ce grand bordel. L’amour, si l’on préfère s’illusionner. Parce que l’amour, ça s’amadoue ; ça n’est pas le rêve du loup. Ça peut se calcule, ça peut se dresser. Ça s’invente surtout. Avec beaucoup de rouerie et de naïveté ; un peu de charme et de vulgarité. Des joies roses et des peines grises. Le sexe en revanche c’est l’envers fauve de toutes ces choses. Une floraison arrogante et mordorée. L’instinct le plus profond. Le plus sombre. » Le propos de ce livre parait être une mise en lumière de l’aînée qui devient la peintre Vanessa Bell, mais qui se serait volontairement effacée derrière cette sœur cadette à la forte personnalité qui deviendra célèbre et célébrée dans le monde littéraire après avoir épousé Léonard Woolf, et d’après l’autrice, n’aurait donc pas laissé beaucoup de choix à son ainée, sans pour autant l’avoir voulu ! C’est du moins ce qui peut se sentir au cours de ces lignes. L’autrice, se faisant alors et de cette façon « romancée », l’interprète de Vanessa. Tout en nous donnant quelques indications judicieuses quant au groupe d’artistes et d’intellectuels dit de « Bloomsbury » qui font, bien sûr, partie de l’histoire ! Vanessa Bell a peut-être été mal comprise ou aveuglée par les sentiments souvent contradictoires et passionnés qu’elle éprouve pour Virginia. Son éventuelle jalousie n’altère en rien l’amour qu’elle lui porte ! Ce qui est ici, souligné par l’autrice qui, à travers la peinture du caractère de Vanessa, veut nous l’indiquer. Ce qu’il y a de pertinent et de nouveau, c’est aussi de découvrir ce qui se tisse, se tricote, se remplit ou se vide entre elles et en fonction des volontés ou des choix que les deux sœurs font ou subissent. Cette volonté de dire – comme si on voulait l’expliquer – ce que l’on ne peut que deviner, sans le savoir vraiment, est assez osée. Anne-Marie Boisson (02/05/23) |
Sommaire Lectures Actes Sud (Janvier 2023) 208 pages - 20 €
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