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Vicki BAUM
(1888-1960)

Hôtel Berlin 43



Ce livre écrit en 1943 est un roman d’anticipation sur la fin de la guerre telle que l’imagine l’autrice américaine d’origine viennoise Vicki Baum. Dans cet hôtel qui sert de refuge à l’élite du troisième Reich – généraux, pilotes en permission, diplomates, hommes d’affaires, un écrivain, une comédienne – on ignore les restrictions, le champagne coule à flots. Mais ce sas n’est pas étanche.  Plusieurs personnages introduisent les drames qui se jouent à l’extérieur ; la télégraphiste qui assène les nouvelles du jour comme une automate, le pilote en permission qui revit sans cesse le cauchemar de sa chute, et surtout Martin Richter, l’étudiant que la Gestapo recherche parce qu’il a osé braver les autorités. Introduit dans l’hôtel, il parvient à se faire passer pour un employé et se retrouve dans la chambre de l’actrice fétiche du Reich, Lisa Dorn. Martin raconte les horreurs qu’il a vécues sur le front russe, les blessures, la souffrance, la faim, le froid, les troupes abandonnées par l’armée allemande. Puis à son retour la protestation étudiante à laquelle il était mêlé et la sauvage répression qui fit quatorze morts parmi eux.

Au début du roman, tous les personnages semblent être des nazis convaincus, sans états d’âme. Mais à mesure que les soldats s’enlisent sur le front russe, que les bombardements anglais arrosent les villes, plus personne ne croit à une issue victorieuse de la guerre. L’autrice pointe l’antagonisme que les nazis ont exacerbé entre les couches de la société allemande au point d’imaginer qu’une fois la défaite consommée, une guerre civile opposera les groupes devenus irréconciliables. Elle imagine le complot des généraux pour en finir avec Hitler, complot qui aura lieu en 1944, elle imagine les raids aériens sur les villes et sur les populations civiles (à l’époque les objectifs étaient purement militaires).

L’adhésion au nazisme des personnages apparaît de plus en plus comme une adhésion de façade. Même les SS ont des comptes à l’étranger et mettent leur famille à l’abri en Suisse.
Lors d’un bombardement particulièrement violent, tous les personnages réunis au sous-sol sont terrorisés et semblent enfin prendre conscience de ce qu’est une guerre quand on est du côté des bombardés. Un SS hurle sa haine antisémite, une jeune femme le remet à sa place.

Nous connaissons les motivations de l’autrice grâce aux articles qu’elle a publiés lors de la parution de l’ouvrage.
« J’avoue que je suis fatiguée de cette simplification qui déferle, tel un océan d’affirmations fausses, sur les Allemands. Je suis d’avis qu’il ne faut pas oublier, même lorsqu’on est en guerre, qu’une nation se compose de gens, et que partout dans le monde les gens se ressemblent. Des gens exclusivement mauvais sont aussi rares que des gens exclusivement bons, ici comme chez l’ennemi. »

En 1946, elle précisait :
« J’ai peu de choses à ajouter aujourd’hui, sinon que je souhaiterais que les Allemands, tout comme leurs adversaires d’hier, établissent une différence claire entre responsabilité et faute. La faute de la guerre incombait aux dirigeants allemands qui ont précipité sans raison le monde entier dans ce malheur effrayant. Mais la responsabilité de l’issue dévastatrice de cette guerre incombe au peuple allemand qui n’eut ni le courage ni le désir de renverser ses dirigeants quand il en était encore temps. »  
          
Le style du roman est agréable, l’action pleine de rebondissements, les personnages évoluent et nous réservent des surprises. Certains personnages semblent avoir abandonné tout espoir, comme cet écrivain anglais retenu prisonnier à l’hôtel et qui, en échange des médicaments et des soins médicaux dont il a besoin, accepte de lire chaque semaine un bulletin de propagande nazi destiné aux Anglais. Pourtant il trouvera la force de se rebeller.

Ce roman a été adapté au cinéma dès 1944 pour « mettre dans l’ambiance les GI’s appelés en Europe »

Nadine Dutier 
(14/09/21)    




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Pour mémoire






Métailié

(Septembre 2021)
280 pages - 22 €


Nouvelle traduction par
Cécile Wajsbrot












Vicki Baum
(1888-1960)
Plusieurs de ses romans ont eu un succès mondial et ont été adaptés au cinéma.

Bio-bibliographie sur
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