Retour à l'accueil du site







Avignon 2021


Quelques spectacles
à retrouver en tournée






Je hurle
Texte, articles et poèmes de Mirman Baheer (adaptation Magali Mougel)
Témoignages, recherches documentaires : Najiba Sharif
Interprétation : Faustine Lancel, Yseult Welschinger
Création musicale et musique sur scène : Jérôme Fohrer
Mise en scène : Éric Domenicone

Zarmina, une adolescente de 15 ans, est née en Afghanistan ce qui est terrible pour une fille. En effet, les femmes n’ont pas le droit de faire des études, pas le droit de parler, d’écrire, de sortir seule, de décider de leur vie… Leurs pères, leurs frères, leurs maris se chargeront de les surveiller ! Les femmes afghanes n’ont pas le droit de choisir.
Zarmina, retirée de l’école à 11 ans, vit dans un village à la campagne. Elle découvre la poésie pachtoune de poétesses afghanes en écoutant la radio. Un jour, elle est surprise par sa belle-sœur au moment où elle dicte l’un de ses poèmes à une poétesse de Kaboul membre d’un groupe de femmes autrices. Le cercle poétique féminin le Mirman Baheer regroupe des femmes qui résistent, écrivent en cachette et tentent de faire évoluer la condition des femmes. C’est le plus grand cercle littéraire féminin d’Afghanistan. Dans les provinces reculées, le cercle compte quelques 300 membres et doit rester dans la clandestinité.
Zarmina est la honte de sa famille qui imagine qu’elle parle au téléphone avec un garçon et elle est cloîtrée. Ce n’est pas une vie pour une jeune fille de 15 ans. Elle choisit de s’immoler par le feu et son frère refuse qu’elle parte à Kaboul pour être soignée dans un hôpital pour les grands brûlés alors qu’elle l’était à 75%. Ses cahiers sont déchirés.
Éric Domenicone, metteur en scène précise :
« L’histoire de Zarmina, porte en elle l’essence de la tragédie, elle ouvre les consciences. Elle révèle la rébellion qui infuse et érige la poésie en acte de résistance, outil du vivant, raison de vivre. »
« J’ai souhaité que la musique habite la scène comme un personnage, en équilibre entre Occident et montagnes d’Asie Centrale. La contrebasse résonne aux accents du Rubab, les chants se mêlent aux rythmes contemporains et aux enregistrements clandestins des voix des poétesses afghanes. »
La mise en scène est très inventive puisque les deux comédiennes créent sous nos yeux des marionnettes de papier qui vont se heurter aux murs de la maison symbolisés par des cubes en tiges métalliques qui représentent l’enfermement.
Un contrebassiste accompagne les comédiennes et la musique s’intercale avec le texte en rythmant parfaitement le spectacle. Najiba Sharif, ancienne secrétaire d’état à La condition féminine et ex-députée en Afghanistan, aujourd’hui réfugiée politique en France, parle sur une vidéo de la situation dramatique de ses contemporaines.
Sur 15 millions, 5% de femmes font des études, 63% des adolescentes sont analphabètes et l’avenir est très sombre pour elles avec une armée afghane en déroute face aux Talibans. Selon Amnesty International, c’est le pire pays au monde pour une femme.
Le spectacle parle d’une situation terrible mais l’espoir existe et les marionnettes de papier, support de l’écriture et des livres, continuent leur résistance et leur combat pour donner la parole à toutes ces femmes qui souhaitent aimer et vivre en toute liberté.
C’est un moment très fort où le pouvoir des mots révèlent toute sa nécessité.

Brigitte Aubonnet 


Toute l'histoire de la peinture
Texte et interprétation de Hector Obalk
Accompagnement musical : Frédéric Lagarde (violoncelle)

Si vous voulez changer votre regard sur la peinture, observer les tableaux autrement, les comparer, apprécier leurs détails insolites, leurs évolutions au fil du temps… allez voir Tout sur la peinture.
C’est un spectacle très drôle, impertinent, provocateur, érudit d’Hector Obalk qui discourt très naturellement sur sa passion puisque son désir d’être critique d’art existe depuis longtemps. Il a réalisé 23 documentaires sur la peinture sur Arte, écrit des livres, participé à de nombreux débats télévisés… et la peinture il connait très bien. Il a disposé 4000 tableaux qui sont projetés sur un écran et dans une improvisation brillante il analyse les époques, les évolutions et les révolutions picturales, les détails de certains tableaux qui sont agrandis sur l’écran et il nous révèle ce que nous n’avions pas forcément remarqué.
Pour Hector Obalk un bon tableau ne se résume jamais à une image mais l’on doit voir plusieurs images dans un tableau. Il nous fait remarquer les anomalies qui ne sont pas forcément un problème puisqu’un tableau n’a pas pour vocation d’être une photographie. Pour lui, l’art de la peinture est l’art de l’illusion. Ce doit être aussi une narration.
Frédéric Lagarde accompagne le spectacle au violoncelle et les moments de silence où nous pouvons observer un tableau et nous faire ainsi notre propre idée. 
Hector Obalk analyse le dessin, les couleurs, le rendu des textures, la lumière, les thèmes… et il compare les œuvres et les particularités de chaque artiste. Il critique férocement certains peintres tout en reconnaissant leur talent et même leur génie.
Bref, l’on ne s’ennuie pas à vagabonder dans la peinture au fil des siècles, l’on rit même beaucoup.
C’est un spectacle dynamique et le temps passe très vite. Tout le monde serait prêt à rester plus longtemps devant ce show pictural où Hector Obalk interroge le jugement esthétique et en libère tout son suc.

Brigitte Aubonnet 


Sales gosses
Texte de Mihaela Michailov
Interprètes : Claire Cahen & Jorge De Moura
Mise en scène : Fabio Godinho

Une actrice joue plusieurs personnages et un musicien l’accompagne sur scène. Leur duo fonctionne à merveille dans un décor d’élastiques accrochés au plafond et maintenus tendus vers le sol par des poids. Cela se passe dans une famille roumaine où une petite fille qui adore fabriquer des animaux en élastiques n’est pas très bien comprise par sa mère qui élève seule ses deux filles et par la maîtresse à l’école où cette petite fille a un comportement particulier. Elle a du mal à se concentrer et à retenir sa leçon sur la démocratie athénienne. Tout ce qui plaît à cette fillette de onze ans ne se trouve pas dans les manuels scolaires. L’enseignante a du mal à capter l’attention de ses élèves et face à cette fillette qui la désarçonne elle perdra patience. Elle la ligotera en lui attachant les mains dans le dos. Les élèves de sa classe lui feront subir le même sort, ils vont la frapper, la torturer et l’attacher à demi-consciente à un radiateur des toilettes. Cette pièce est inspirée d’une histoire vraie qui a été très médiatisée en Roumanie.
Chaque personnage donne son point de vue pour justifier son attitude et ses gestes violents. Ils exposent leurs raisons et les argumentent.
La cruauté est montrée de façon symbolique par des coups frappés sur des cymbales. Cela rend la scène insupportable face à ces actes gratuits sans autre origine que l’incompréhension face à la différence et au refus d’une enfant de rentrer dans le moule de l’école et d’une société. Le texte est excellent, dérangeant dans les justifications de chacun, aucun jugement de valeur n’est porté. Chaque spectateur se fera son idée et forcément cela interroge sur le système scolaire et le système politique. Comment enlève-t-on la parole et les moyens d’expression de ceux qui ont leur particularité et leur originalité dans un monde où l’on aime formater les enfants dès le plus jeune âge ?
La mise en scène est très réussie, l’utilisation des élastiques, symbole aussi de l’esprit créateur de la petite fille, crée sans cesse de nouveaux univers et de nouvelles ambiances.
L’humour est aussi présent malgré le thème dramatique et les questionnements sur la démocratie, le système scolaire et familial ainsi que le rôle des politiques dans la vie de la cité.
C’est une pièce dont on ne sort pas indemne mais qu’il faut absolument voir car la démocratie est à défendre sans répit et la violence à combattre en permanence car elle peut s’immiscer très vite dans notre quotidien.
Un spectacle subtilement dérangeant à ne pas manquer.

Brigitte Aubonnet 


Perfidia
Texte et interprétation : Laëtitia Pitz
Collaboration artistique  : Alain Chambon

Très belle prestation pour parcourir le XXe siècle avec toute une famille et une multitude de personnages.
Pierre et Jeanne se rencontrent au moment de la Seconde Guerre mondiale et ils auront une fille Eva. Nous suivrons ces personnages et bien d’autres au fil de leurs vies, de leurs rencontres, de leurs séparations, de leurs joies et de leurs peines.
Laëtitia Pitz, seule sur scène, lit son propre texte avec une musicalité extraordinaire où la poésie des mots, leurs rythmes, leurs sonorités nous entraînent et nous portent dans cette partition de la vie qui entremêle les histoires personnelles et les évènements historiques où les périodes de guerre bouleversent les familles de la Seconde Guerre mondiale à la guerre d’Algérie.
Les femmes évoquées par Laëtitia Pitz s’entraident dans les moments douloureux de leurs vies comme les avortements puisque la contraception n’existait pas au début du XXe siècle. Elles connaîtront aussi l’évolution des lois qui peu à peu les libéreront.
Eva, la fille de Pierre et Jeanne, est choriste, la voix et la musique sont essentielles pour elle. Laëtitia Pitz à la diction parfaitement ajustée incarne la musicalité, la douceur, la force et la poésie des mots pour traduire les émotions qu’elle fait émaner debout derrière son pupitre où elle réussit ce tour de force de donner vie à une multitude de voix dans un monologue très vivant. Une chanson d’Alberto Dominguez nous accompagne au cours de ce voyage dans le temps avec un arrangement musical de Xavier Cugnat pour le final.
La compagnie Roland furieux a toujours fait ce pari : le sens n’est jamais aussi bien porté que par une attention particulière au sensible, à la musicalité qui habite la langue, au flux de ses ondulations, aux secousses de ses silences.
Un théâtre qui viendrait réveiller les angles morts de notre écoute.

Brigitte Aubonnet 


Un contrat
Texte de Tonino Benacquista
Interprètes : Patrick Seminor & Olivier Douau
Mise en scène : Stanislas Rosemin

L’affiche qualifie la pièce, Un contrat de Tonino Benacquista, de « polar psychanalytique ». Elle présente une partie d’échecs qui n’a rien d’un jeu, mais tout d’une menace de mort.
Le ton est donné !
Au lever de rideau, une musique de jazz, de celles qui accompagnent les bons vieux polars, amorce le suspense.
Le spectateur assiste alors à un huis clos, qui va le tenir en haleine de bout en bout.
Les premières amours de Tonino Benacquista, auteur chevronné et couronné, furent les romans noirs. Il diversifia ensuite sa création littéraire, mais quel que soit le genre qu’il aborde, sa production est toujours imprégnée de sa profonde et subtile connaissance de l'âme humaine.
Cette pièce en atteste parfaitement. L’intrigue ouvre un champ de réflexion et d’introspection qui fait la part belle aux considérations humanistes. La psychologie, bien-sûr, mais la philosophie, la déontologie et l’éthique y sont aussi mêlées.
Un homme se rend chez un psychiatre pour tenter d’apaiser ses insupportables crises d’angoisse. Crises qui, nous l’apprenons petit à petit, peuvent lui être fatales. Le thérapeute, renommé pour son extrême compétence, réagit tout d’abord en professionnel exemplaire.
Et puis, plus rien ne se passe comme il se devrait.
Le colloque singulier tourne à la confrontation, qui vire au duel.
La peur est omniprésente.
Le cossu cabinet se transforme en ring sur lequel les boxeurs distribuent et reçoivent, dans une régulière alternance, coups et chaos. Chaque protagoniste passe, étonnamment, du statut de victime au statut de bourreau. Le non-dit est de rigueur, tous les repères volent en éclat.
Surtout ceux du spectateur !
Désarçonné par les silences de l’un et les secrets de l’autre, livré à sa seule sagacité, il ne peut qu’échafauder les théories les plus audacieuses, les plus effrayantes, les plus jubilatoires aussi... n’oublions pas que nous sommes venus assister à une énigme ! Nous aimons cela, nous en redemandons, et nous recevons même en prime de l’humour... noir, polar oblige !
Stanislas Rosemin propose une mise en scène très sobre, choix efficace qui exalte le jeu des comédiens.
Patrick Seminor et Olivier Douau incarnent magistralement leurs personnages. Ils restituent avec talent l’intensité dramatique de la pièce. Ils font vibrer sa cohorte d’émotions, de tensions, d’interrogations. Ils distillent avec brio les réponses, messages forts délivrés par l’auteur.
Leur jeu est si pertinent que l’angoisse des personnages et ses manifestations sont rendues palpables dans la salle. Ils créent un rythme pulsatile... Ont-ils le cœur qui s’emballe, le souffle court, nous retenons le nôtre !
Économes en paroles quand c’est nécessaire, leurs mimiques prennent le relais.
Violents quand il le faut, leur impatience à voir le « traitement » agir et la paix régner à nouveau au sein de ce cabinet devient la nôtre.
Nous nous sommes d’ailleurs laissé dire (et l’avons constaté) qu’ils étaient régulièrement félicités par d’authentiques psychiatres et thérapeutes pour la justesse et la finesse de leur performance !
Alors, même si le jeu de mot est facile, nous ne résisterons pas à conclure ce compte-rendu en vous recommandant vivement de vous rendre au Théâtre L'Adresse pour assister à ce Contrat si brillamment exécuté !

Catherine Arvel 



Retour
Sommaire
Une loge
pour le strapontin





Site du Festival OFF :
www.avignonleoff.com


Cliquer sur chaque affiche pour voir la page du spectacle et l'adresse du théâtre









Compagnie
La Soupe





















Compagnie
Grand Art
















Compagnie
du Centaure


















Compagnie
Roland Furieux
















Compagnie du
Nouveau Monde