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Photo © Christophe Raynaud de Lage




Les trois sœurs


d'Anton Pavlovitch
Tchekhov










Un soleil généreux pénètre dans la confortable maison des belles Olga, Macha et Irina où le salon précède une vaste salle à manger. Le personnel s’y affaire pour préparer une réception.

Les sœurs habitent effectivement la propriété héritée d’un papa général qui est décédé depuis un an. Cependant, toutes les trois pensent à quitter leur calme province afin d’aller vivre à Moscou en compagnie d’Andrei leur jeune frère, garçon apparemment plein de talent et d’avenir. En attendant, elles reçoivent à souper quelques officiers de la proche garnison au moment même où Irina, la plus jeune, fête ses vingt ans. Tous les espoirs semblent donc permis aux sœurs Prozorov.

Aussi enthousiastes d’un avenir radieux que nostalgiques d’un passé revendiqué, elles sécrètent cependant une ambition infondée. Et leurs courtisans en uniforme n’échappent pas non plus à l’échange des lieux communs concernant un avenir idéalisé assez naïvement. Sans oublier de boire abondamment cette vodka qui libère traditionnellement l’âme russe.

Cette ambiance provinciale et bourgeoise orchestre les inévitables rencontres et les flirts qui s’ébauchent au son de musiques nostalgiques ou enjouées mais le brillant frère qui possède à la fois l’aisance donnée par la culture et la passion du jeu va épouser une emmerdeuse patentée. Par cette belle-sœur interposée le diable va-t-il désormais arbitrer le destin de cette rêveuse famille ?

Le côté brillant de cette situation risque effectivement de se ternir car le régiment va quitter ce lieu de garnison trop éloigné de la capitale et Andrei va décevoir son entourage car il n’a pas poursuivi ses études et il va devoir rembourser une énorme dette de jeu. Deux éléments décisifs et imprévus pour cette famille bien pensante.

On passe ainsi de la danse vibrante des espérances ingénues à une déprime carabinée décrite avec une belle subtilité. Alain Françon a su très heureusement la capter et la mettre en scène.

Dans cette pièce totalement désespérée, l’incommunicabilité entre les êtres renforce l’impuissance de ces velléitaires et l’ensemble de la dramaturgie devient aussi réaliste que dramatique Ainsi, Tchekhov se révèle sans conteste un auteur moderne dont la plume est aussi scalpel de l’âme. Mais il ne néglige pas pour autant l’émotion, inévitable accompagnatrice de ces destinées chahutées.

Cette nouvelle version des Trois sœurs passe magnifiquement la rampe grâce à la conjonction heureuse d’un texte dont l’authenticité est respectée sans être modifiée par une prétentieuse relecture ainsi que par une équipe de comédiens qui rendent ces destins totalement crédibles.

Les costumes de Patrice Cauchetier, infiniment séduisants, sont conformes aux critères de la mode de l’époque et l’équipe artistique dirigée par Alain Françon réalise un sans faute qui marquera la saison théâtrale.

Claude Chanaud 
(23/12/10)    



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Montreurs d'ours











Salle Richelieu
Place Colette / Paris 1er

www.comedie-francaise.fr


Mise en scène
Alain Françon

Avec
Michel Robin
Éric Ruf
Bruno Raffaelli
Florence Viala
Coraly Zahonero
Laurent Stocker
Guillaume Gallienne
Michel Vuillermoz
Elsa Lepoivre
Stéphane Varupenne
Adrien Gamba-Gontard
Gilles David
Georgia Scalliet
Hélène Surgère
et
Floriane Bonanni
(La violoniste)

Scénographie
Jacques Gabel

Costumes
Patrice Cauchetier

Lumières
Joël Hourbeigt

Dramaturgie
et assistante
à la mise en scène
Adèle Chaniolleau

Son
Daniel Deshays

Musique originale
Marie-Jeanne Séréro

Traduction
André Markowicz
Françoise Morvan


Actes Sud / Babel