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La tête des autres de Marcel AYMÉ En cette année 2013 où les Français s'inquiètent beaucoup sur les capacités de réaction de leur gouvernement, sur celles de leurs élus et sur la fragilité de notre économie, revient sur une prestigieuse scène parisienne la détonante comédie titrée La tête des autres que Marcel Aymé avait tirée à bout portant sur les liens plus que douteux entretenus au début des années cinquante entre gens de pouvoir, gens de justice et gens d'affaires. Ce hasard de programmation tombe bien pour rappeler à nos contemporains que notre démocratie, qui ne veut pas sombrer dans un populisme râleur et sans perspective, ne doit pas se départir de la vigilance attentive des citoyens. De plus, cette pièce est un bonheur de scène dont Lilo Baur signe l'heureuse reprise incluant des gags soigneusement codés. D'entrée de jeu, Marcel Aymé, précurseur bien inspiré, y condamne d'abord la peine de mort dont Robert Badinter fit ensuite et très heureusement son cheval de bataille. Ensuite, il y dénonce une connivence de classe sociale qui ouvre la porte aux dérapages et enfin il nous démontre avec brio combien la condamnation d'un accusé peut dépendre de deux facteurs indépendants des faits : d'abord un système tordu où la justice n'est plus indépendante du pouvoir et ensuite le fait qu'une tête peut tomber ou non suivant le talent des intervenants. Vaste programme au cours duquel des femmes sous la domination de maris très macho vont réagir Nous ne sommes évidemment plus dans ce difficile après-guerre
tumultueux où Marcel Aymé avait beau jeu de frapper fort car la
peine de mort qui à l'époque était acceptée par
une majorité de citoyens ne posait pas encore de problème aux
consciences républicaines. Reste que malgré la nouvelle donne du XXIe siècle où l'on ne coupe plus la tête des assassins, l'histoire d'un Procureur de la République congratulé par ses pairs et sa famille pour avoir obtenu une condamnation à mort nous hérisse toujours le poil. Ce point de départ qui prélude une situation impossible pour deux magistrats veules et ambitieux va vous faire vivre une dramaturgie dont la truculence n'a rien perdu du temps qui passe. Les histoires d'amour qui servent de trame à une découverte de la vérité sont celles de conniventes conventions pour une classe sociale dominante et c'est bonheur de voir progressivement révéler le dessous des cartes jusqu'à un dernier acte jubilatoire où un homme sans état d'âme couronne cette histoire de son cynisme, époustouflante caricature d'un affairiste historique par Serge Bagdassarian. Les dialogues originaux de Marcel Aymé demeurent brillants et les comédiens de la Comédie Française y sont fort convaincants. Grâce à eux, vous allez vivre un grand moment de théâtre jusqu'au 17 avril ou ultérieurement car la salle du Vieux Colombier qui est comble tous les soirs connaît évidemment la nécessité d'une reprise dont la date n'est pas encore fixée. Claude Chanaud |
Sommaire Montreurs d'ours Théâtre du Vieux Colombier 21, rue du Vieux Colombier 75006 Paris Mise en scène Avec Scénographie Costumes Lumières Création sonore Maquillages et coiffures Assistante Bernard Grasset, 1952 et Livre de Poche |
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