Le cabaret des hommes perdus

de Christian Siméon

Photo © Philippe Delacroix

Cabaret... Cabaret...

Le mot est magique. Pour le spectateur contemporain qui attend des ouvertures sans contrainte et des joies délirantes, le cabaret évoque tout à la fois Liza Minelli dans le film éponyme, Jean-Claude Dreyfus à la Grande Eugène et Jean-Marie Rivière à l'Alcazar de la rue Mazarine. Dans sa volonté de séduire, ce lieu de scène ne se préoccupe guère de convenances bourgeoises car, depuis des siècles, il englobe, pour le meilleur et pour le rire, l'univers des travestis.

Catalyseur de tradition irrévérencieuse, ce petit monde des gens qui s'habillent indifféremment "masculin ou féminin" révèle, avec un humour que l'on qualifierait à tort de "dévastateur" de véritables questionnements humains avec un bonheur d'expression aussi effronté que fascinant. Et gay !

Quoiqu'en pensent certains pisse-froid dont Molière a ridiculisé le conformisme, c'est un genre de spectacle à part entière. Evidemment, il plait d'abord aux spectateurs qui tolèrent les différences entre les uns des autres. et qui acceptent nos ambivalences ou nos phantasmes. Voire… d'en rire sans complexe.

LE CABARET DES HOMMES PERDUS au Théâtre du Rond Point participe de tout cela dans un cadre essentiellement ludique. Et la pièce atteint l'épanouissement d'une heureuse conjonction : le mystère de la nuit, la chaleur des échanges, l'intervention d'un Destin opportuniste et l'esprit de dérision qui est son fond de sauce. La parodie de certaines revues que la nuit parisienne continue à proposer à des touristes innocents, rythme le récit. C'est ainsi que la vie de ce paumé de Dickie Tayer va vous provoquer des rires libérateurs.

A la fois farce et pastiche, ce spectacle est présenté sous la forme d'une comédie musicale. S'y ajoute un clignement d'œil lucide concernant les interrogations de chacun d'entre nous sur notre part d'étrange.

Christian Siméon, l'auteur, ainsi que Jean-Luc Revol, le metteur en scène, ont réussi cette performance sans jamais tomber dans la vulgarité de certains mots ni d'une gestuelle regrettable. Y compris quand le personnage dont vous découvrirez les navrantes vicissitudes postule devant des spécialistes du cinéma "porno" afin d'y devenir acteur. Le compositeur Patrick Laviosa y a ajouté une dimension musicale adaptée et les ballets d'Armelle Ferron sont excellents.

En allant voir LE CABARET DES HOMMES PERDUS, vous ne rentrerez donc pas dans le rituel des facilités grivoises mais vous allez assister à un spectacle jubilatoire. Denis D'Arcangelo, Sinan Bertrand, Alexandre Bonstein et Jérôme Pradon, les quatre comédiens de cette comédie "pas comme les autres", sont remarquables dans leurs nombreux travestissements. Ils sont au Rond-Point jusqu'à fin octobre, cependant je ne doute pas que leur Destin les promène bien plus longtemps dans la nuit de Paris.

Claude Chanaud 
(17/09/06)    



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Montreurs d'ours






au Théâtre
du Rond-Point


2 bis, avenue
Franklin D. Roosevelt
75008 Paris



Location :
01 44 95 98 21
et sur le site
du théâtre :
www.theatredurondpoint.fr


Une pièce de

Christian Siméon
www.christiansimeon.com



Mise en scène par
Jean-Luc Revol





Photo © Philippe Delacroix