George Dandin


de
Molière






Mais que diable allait-il faire dans cette galère ?

Le prétexte de la pièce n'est pas mince. Et la galère y est incluse. Placée par Molière en 1668 dans la large rubrique des divertissements royaux, c'est d'abord une démonstration efficace des cloisonnements dans la France du 17e siècle. En effet, l'argent a propulsé dans un monde qui le dédaigne profondément un paysan enrichi appelé George Dandin. Ce dernier veut effectivement s'élever dans l'échelle sociale. Ce faisant, il devient le jouet d'une aristocratie caricaturale dont il subit une série de graves humiliations. Et il va payer cher sa prétention.

Evidemment, cette pièce a été conçue pour satisfaire les goûts du monarque, lequel tolérait éventuellement que l'on ironisât sur son entourage à particules, tant qu'il maintenait le système royal et ses hiérarchies d'une main de fer.

Néanmoins, George Dandin, obsédé par son erreur de parcours, vit une permanente souffrance qui va le conduire un jour à envisager le suicide. Cette comédie est donc d'abord un drame ! Les comédiens du Français l'ont plusieurs fois jouée en faisant surtout ressortir cet aspect désespéré. Sans faire disparaître cet élément, car il est consubstantiel à l'histoire, Marcel Maréchal, lui, est revenu à une interprétation plus cocasse et plus actuelle. Certes le "parvenu" accompagne également les sociétés contemporaines ce qui donne à la pièce une résonance de toutes les époques, cependant le Dandin attaché à ses droits d'époux à la manière d'un propriétaire, y représente heureusement un mari en voie de disparition.

La mise en scène de Marcel Maréchal rappelle d'abord une très ancienne tradition de la commedia dell'arte exploitant l'opposition entre barbons et jouvenceaux. Ainsi que la permanence d'un personnage faisant rire depuis lurlure malgré son côté désolant, voire navrant : le cocu du système marital.
N'oublions pas que Molière avait commencé par écrire des farces mettant souvent en scène les désagréments du mariage et les joies de l'adultère. Maris trompés et femmes rusées, personnages récurrents, faisaient rire aux éclats un public populaire. Mais les spectateurs d'aujourd'hui ne dédaignent pas ce clin d'œil dont ils ne sont cependant pas dupes. Même constat pour la vénale soubrette, complice rusée de madame Dandin.

Le George Dandin du Théâtre 14 est un bon cru où Marcel Maréchal et les Tréteaux de France retrouvent la "vis comica" qui forma le dramaturge Molière à "peindre efficacement le ridicule des hommes de son temps". Et il joue sans le trahir le personnage devenu pour son malheur "Monsieur de la Dandinière". Subtil équilibre.

Jacques Angéniol interprète avec beaucoup de bonheur une madame de Sottenville débridée. Michel Demiautte est un monsieur de Sottenville à la faconde réjouissante mais toute l'équipe exprime un brio évident et une gaieté communicative. Le décor de Thierry Good et les costumes de Bruno Fatalot participent de cette efficacité.

Claude Chanaud 
(21/01/07)    



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Montreurs d'ours




Marcel Maréchal

au Théâtre 14
Jean-Marie Serreau


20 av. Marc Sangnier
75014 Paris

Location :
01 45 45 49 77



Mise en scène :
Marcel Maréchal









le texte
est disponible
dans diverses
collections de poche
et même en bandes dessinées
(Texte intégral
Ed. Vent d'Ouest
12 €)