Mishelle
di Sant'Oliva


d'Emma Dante


Tragédie palermitaine
(surtitrée en français)


Vous allez découvrir une tragédie sicilienne dans laquelle une curieuse famille côtoie le drame en permanence. Située dans un quartier chaud de Palerme, "Mishelle di Sant'Oliva" exploite effectivement des situations extrêmes mais EMMA DANTE, son auteur, nous surprend très heureusement par son originalité et son efficacité. De plus cette pièce est jubilatoire dans sa noirceur.

Certes, la capacité à inclure la dérision tout au long des fictions est devenue au cours des époques une spécificité italienne que l'on retrouve aussi bien dans son cinéma que dans bien d'autres genres d'expression. Nos cousins transalpins excellent dans ce "toujours plus". Cependant, sur les tréteaux contemporains, non seulement Emma Dante s'inscrit avec un incontestable brio dérisionnel mais elle y ajoute la vigueur et la rusticité des traditions siciliennes qui ne font guère dans la dentelle et les ronds de jambe.

La mise en scène, la scénographie et les costumes de la pièce sont également d'elle ; les trois sont d'une efficacité parfaitement maîtrisée y compris quand les corps des comédiens s'étalent sans l'hypocrisie des conventions traditionnelles.

Au cours de ce drame, un père et son fils pratiquent une sorte de strip-tease psychologique du genre progressif mais qui va "jusqu'à l'os" si vous m'autorisez la métaphore. Ils se haïssent, s'affrontent, s'aiment quand même et vice-versa. Puis, quand les souvenirs affluent au cours de leur répétitif conflit, les deux hommes finissent par baisser la garde et passent à l'évocation du passé. Là, apparaissent les faits gênant pour le psycho des deux.

La maman disparue était-elle première danseuse de l'Olympia de Paris ? Gaetano veut-il se suicider pour mettre un terme à son handicap d'homme âgé ? Comment Salvatore Lucchese, le fils du précédent, trouve–t-il l'argent permettant à cette famille, réduite à deux nombrils exacerbés, de vivre, de s'habiller et d'acheter de surcroît une nourriture de bonne qualité.

On va progressivement tout savoir. Le texte d'Emma Dante est sculpté dans la matière hurlante de la misère au cul verdâtre. Les deux héros de cette tragédie vont se livrer et leur aveu touche au plus profond car la fragilité de l'être humain s'y révèle dans toutes ses dérives potentielles. Pourtant, paradoxe simplement apparent, les rires fusent en permanence.

Les numéros des deux comédiens, Giorgio Li Bassi et Francesco Guida, sont extrêmement brillants. Ils nous font assister à un moment unique de désespérance mise en valeur par l'humour le plus noir lequel contraste avec une apparente légèreté de comportement. Tout cela s'accompagne d'une performance physique incontestable.

Ainsi, je vous invite, en allant les applaudir, à vivre une des soirées de théâtre les plus percutantes de cette saison 2006/2007. C'est au théâtre du Rond Point, salle Tardieu jusqu'au 17 juin. Attention : une autre pièce d'Emma Dante vous attend au même théâtre dans la salle Roland Topor. Il s'agit de VITA MIA. Et si vous assistez aux deux spectacles vous bénéficierez d'un tarif très préférentiel.

Claude Chanaud 
(18/05/07)    



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Montreurs d'ours





au Théâtre
du Rond-Point


2 bis, avenue
Franklin D. Roosevelt
75008 Paris



Location :
01 44 95 98 21
et sur le site
du théâtre :
www.theatredurondpoint.fr


avec
Giorgio Li Bassi
et
Francesco Guida

mise en scène,
scénographie et costumes :
Emma Dante

lumières :
Irene Maccagnani

traduction des surtitres :
Celia Bussi