INFERNO de Dante    Photo © Christophe Raynaud de Lage



AVIGNON

2008



INFERNO de Dante
Photo © Christophe Raynaud de Lage

En juillet, la tradition des Montreurs d’Ours est de se retrouver dans la ville des anciens papes pour y montrer leurs ursidés et leurs nouveaux dansotements. Les médias de 2008 bruissèrent de l’évènement à pleines colonnes car on attendait avec un grand intérêt l’INFERNO de DANTE vu par l’italien Roméo CASTELLUCCI et HAMLET revu et corrigé par le metteur en scène allemand OSTERMEIER.

Concernant la première pièce, l’enfer dantesque prend ses racines dans notre environnement et c’est sans doute pour cela que l’homme escaladant les murs de la Cour d’Honneur pour fuir ailleurs est accompagné de notre regard attentif. Ce voyage initiatique n’est pas dépourvu de perspectives, mais les divers clins d’œil à notre monde contemporains n’ajoutent pas grand chose à l’affaire. Quelques tableaux de CASTELLUCCI sont superbes.

Pour le drame de SHAKESPEARE, le metteur en scène a voulu (dit-il) mettre un coup de pied aux fesses d’Hamlet. Je ne l’ai pas suivi dans cette tentative qui m’a laissé nostalgique du bien connu « to be or not to be » allant d’une tête folle vers un crâne vide. Beaucoup ont applaudi cette relecture.

Dans ces deux dramaturgies, des novations scéniques sont à souligner – à applaudir aussi – mais, à mon sens, elles étonnent l’amateur plus qu’elles ne révèlent l’œuvre. Et, pour le signataire, resté sur sa faim, le soufflé du IN était retombé. D’annonces surabondantes ? Peut-être.

En revanche, dans le OFF, j’ai goûté des plaisirs moins sophistiqués mais sans doute plus évidents aux « non initiés » des programmations officielles. Je les recommande à ceux qui parcourent les rues ocres de la cité car ils pourront y découvrir l’éventail large de créations allant de l’humour le plus déjanté à la rigueur d’une pensée critique, celle où d’éminents penseurs introduisent « le sens nécessaire ». Je ne parle évidemment pas des spectacles ratés. Il y en a !

Dans le peloton d’un rire salubre, il faut d’abord voir « LA BRASSERIE DE L’UNIVERS » de Jean-Michel RIBES et Roland DUBILLARD ainsi que Jean-Paul FARRÉ dans « L’ILLUSION CHRONIQUE ». Une fantaisie au royaume des dates. C’est au Petit Louvre.

Ensuite je vous propose « SORTIE D’USINE ». Nicolas BONNEAU y fait merveille et nous émeut en nous contant une classe ouvrière authentique dont le travail est délocalisé. On y rit également ! Puis n’hésitez pas à passer de LA MANUFACTURE au MAGASIN THÉÂTRE ou la compagnie des Mistons a monté « TU AS BIEN FAIT DE VENIR, PAUL », excellente pièce de CALAFERTE jouée dans la sobriété nécessaire. Et vous pourrez vous étonner de manière heureuse avec le mariage insolite et élégant de MOLIERE & Michel VINAVER à l’Espace ALYA. La pièce s’appelle « MOLIERE ET SON DERNIER SURSAUT ».

Enfin, je vous recommande de passer au Théâtre DES HALLES où Alain TIMAR a réussi un exceptionnel grand chelem capable de vous mobiliser du matin à tard dans la nuit. Et je n’ai pas tout vu ! Vous pourrez y commencer avec des comédiens philosophes jouant alternativement « LES MEDITATIONS DE DESCARTES » et les « ENTRETIENS ENTRE D’ALEMBERT & DIDEROT » Dissertations brillantissimes. Vous pourrez continuer heureusement ce périple avec une très efficace comédie en musique où notre monde métisse bien ses contradictions. Ça s’appelle « SUBLIM INTERIM » et c’est signé par Louise DOUTRELIGNE dont la Compagnie INFLUENSCENE avait présenté – en 2007 et au même théâtre – le mémorable « VIENNE 1913 ».

A la suite, vous pourrez assister à « JE VEUX QU’ON ME PARLE » joué par un trio heureusement délirant. Il s’agit d’une sélection brillante de textes de CALAFERTE. Enfin pour votre soirée « LE MOIS DE MARIE » de Thomas BERNHARD sera une découverte. Trente minutes d’un texte grinçant qui touche de vieilles cicatrices. Ou le touchant « TEXACO » qui remue sans le renier notre passé antillais.

Bien sûr, je suis bien loin d’avoir tout vu car 705 compagnies jouent, jusqu’au 2 août, 1050 spectacles... Et je suis passé sans doute à côté de bien des scènes aux spectacles intéressants.

Cependant, avant de clore cette rubrique, je dois vous souligner qu’au Gymnase du Lycée Saint-Joseph, des historiens et des philosophes parlent jusqu’à fin juillet de notre époque aux repères fluctuants et de notre planète désenchantée. Passage recommandé qui ajoute au tohu-bohu ambiant une spiritualité nécessaire.

Claude Chanaud 
(21/07/08)    


      


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