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Pavlo ARIE


Au début et à la fin des temps


En Ukraine, non loin de la rivière Prypiat, dans un ancien hameau entouré de forêts et de marécages, vivent, privés de tout, abandonnés de tous, une vieille femme, Baba Prissia, sa fille Slava et son petit-fils Vovtchyk, gentil naïf ou idiot magnifique.

Cet endroit c’est la zone interdite autour de Tchernobyl où, trente ans après l’explosion de la centrale nucléaire, la nature a repris ses droits, chassant au loin toute trace de la civilisation humaine qui a causé sa propre perte. Celle-ci tente parfois de brèves incursions, à travers les visites de l’Îlotier, porteur de messages de l’extérieur, ou quand la radio fonctionne et peut alors donner des nouvelles, peu réjouissantes, du monde qui continue sa course folle : scandale autour de la transplantation d’organes, arrivée au pouvoir d’hommes sans moralité… Toute cette actualité à laquelle a décidé d’échapper Baba Prissia, vieille dame de 86 ans au caractère bien trempé. « Heureusement que nous vivons dans la zone… Ils ne sont pas près d’arriver ici avec leur amélioration… Je te le dis, mon petit, méfie-toi des gens, il n’y a que de la saloperie là-dedans ! »

Celle qu’on appelait autrefois « La partisane » et qui a liquidé à elle seule un détachement allemand de 12 hommes, assure aujourd’hui la subsistance de sa famille grâce à sa connaissance des fruits et des gibiers que l’on trouve encore dans cet espace tout à la fois originel et contaminé.
Connaisseuse des mythes et des légendes qui peuplent le lieu (« qui voit une ondine le jour verra la mort frapper à sa maison ») et des errements de la Russie moderne (« je n’ai jamais aimé les Soviets, moi, mais avec eux au moins les choses étaient claires. Alors que maintenant, on n’y comprend plus rien. ») le personnage principal semble matérialiser à elle seule toute la tragédie de ceux qui ont vécu l’effondrement du bloc soviétique, se débattant pour exister entre la dictature du prolétariat et la loi de la jungle qui lui a succédé. Mais aussi forte qu’elle soit, elle ne pourra empêcher son petit-fils Vovtchyk, gentil sans défense, d’être attiré vers ceux qui causeront sa perte.

On pense évidemment aux témoignages déchirants recueillis par Svetlana Alexievitch dans La Supplication, Tchernobyl chronique du monde après l’apocalypse mais aussi dans La Fin de l'homme rouge, paru en 2013, alors que Pavlo Arie écrivait l’histoire de ce drame ukrainien.
Dans Au début et à la fin des temps, l’auteur relate, en douze scènes, la difficulté de vivre après un drame humain tel que l’explosion de la centrale de Tchernobyl, mais aussi l’humanité qui survit malgré tout dans une zone sinistrée et surtout l’amour qui subsiste entre les membres d’une famille meurtrie.

Amandine Farges 
(26/06/20)      



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Théâtre








L'Espace d'un instant

(Février 2020)
88 pages - 13 €


Traduit de l’ukrainien
par
Iulia Nosar
&
Aleksi Nortyl





Pavlo Arie,
né en 1975 en Ukraine, dramaturge, scénariste, peintre, artiste conceptuel et traducteur de l’allemand et du polonais, est l’auteur d’une quinzaine de pièces, présentées dans une dizaine de langues.