Le tango
comme un roman
et la danse
comme la vie
avec Elsa Osorio





En janvier dernier, Elsa Osorio séjourna quelque temps à Paris afin de promouvoir son roman Tango. Emportée par ce récit brillant et quelque peu vertigineux, je profitai sans hésiter d'une occasion qui m'était offerte de la rencontrer. L'entretien eut lieu dans les salons de l'hôtel d'Aubusson, à Paris – une demeure du XVIIe siècle aménagée aux normes exigées par un hôtel 4 étoiles. Les authentiques tapisseries d'Aubusson qui ornent les murs, les revêtements de sol, les fauteuils, guéridons et tables qui occupent les espaces de réception exhalent tous ce souffle subtil que seuls dégagent les objets chargés d'années – voire de siècles – qui intimide un peu et invite, sans que l'on s'en rende vraiment compte, à parler bas, à se déplacer à pas de loup. Entre deux séances photos, et malgré un emploi du temps que je devinais bien rempli, Elsa Osorio parla longuement du tango, de l'Argentine, de son travail de romancière... Son français roulé dans les harmonies de la langue espagnole, sa voix rauque de fumeuse confèrent à sa diction qui articule les mots avec soin un charme hypnotique ; son regard franc et mobile, ses mains qui dessinent sans cesse d'élégantes arabesques font qu'on l'écoute avec passion.
Je pense à l'étrange magnétisme qui lie l'un à l'autre les danseurs de tango, et je me dis qu'il ne pouvait être question d'autre chose que de magnétisme en présence d'une danseuse de tango...


Vous avez fait beaucoup de recherches pour ce livre – combien de temps celles-ci vous ont-elles demandé, en dehors du travail d'écriture purement romanesque ?
Elsa Osorio :

Je m'étais déjà intéressée à l'histoire du tango au début des années 1980 et je l'avais étudiée d'assez près pendant à peu près deux ans – j'avais notamment interviewé beaucoup d'artistes et d'amateurs qui avaient vécu les débuts du tango, et qui sont morts aujourd'hui. J'avais donc amassé un certain nombre de documents, et cela m'a déterminée à écrire ce roman. A partir du moment où j'en ai commencé la rédaction, il m'a fallu en tout six ans de travail pour le terminer – d'autant que je continuais d'aller à la pêche aux informations pendant que je rédigeais le roman : j'avais toujours besoin d'un détail supplémentaire, d'une précision qui me manquait... Je dois dire que je me suis un peu perdue dans mes recherches, qui se sont étendues bien au-delà du tango stricto sensu. Par exemple, j'ai lu beaucoup de journaux, de magazines féminins datant de l'époque où j'ai situé mon roman – en gros les trois premières décennies du XXe siècle. J'ai aussi consulté les annuaires téléphoniques – les noms des rues et des quartiers de Buenos Aires changeaient sans cesse – et ils m'ont permis d'employer les noms exacts aux bonnes périodes. Grâce à eux, je disposais également d'informations d'ordre sociologique à propos des habitants : je savais qu'il y avait là un coiffeur et, à côté, telle ou telle boutique... J'avais ainsi une idée exacte de l'environnement dans lequel je plaçais mes personnages. Il y a eu beaucoup de mouvements de population ; j'ai pu les suivre grâce aux annuaires et les consulter a été un très grand plaisir. Procéder de la sorte a été ma façon de m'immerger dans le contexte de l'époque dont je voulais parler dans mon roman ; bien sûr, je n'ai pas utilisé l'intégralité des données – je voulais écrire un roman, pas une encyclopédie ; au fond le tango est avant tout un prétexte romanesque pour raconter l'évolution d'une partie de la société argentine à une certaine période – et j'ai encore sous la main des masses d'archives considérables sur l'histoire de Buenos Aires et du tango.

Vous dites que le tango est un prétexte romanesque. Pour quelle raison vous a-t-il paru être le mieux à même de supporter la vaste architecture de votre roman ?
Essentiellement parce qu'à la période où j'ai voulu situer mon roman – la fin du XIXe siècle jusqu'au début des années 30 – il m'a semblé que le tango, de par ses origines et la façon dont il s'est répandu dans les différentes couches sociales, était le phénomène culturel le mieux adapté à la convocation de personnages issus d'horizons et de milieux sociaux très divers.
Le tango n'a pas ses racines dans les classes laborieuses, il est né dans les faubourgs, chez les marginaux : c'est dans les bordels qu'on a commencé à jouer cette musique et à la danser. Il s'est ensuite propagé dans les strates supérieures de la société par l'intermédiaire des messieurs de famille qui venaient là pour s'encanailler. On jouait aussi le tango dans les cours de certains conventijos – de grandes maisons où les gens vivaient jusqu'à huit dans une seule chambre – mais certaines figures étaient interdites à la danse parce qu'elles étaient considérées comme obscènes. Le tango est apparu en France en 1906 mais ce n'est qu'à partir de 1910 qu'il s'est vraiment diffusé, grâce à quelques riches Argentins qui partageaient leur temps entre Buenos Aires et Paris, et qui ont osé danser le tango dans les salons mondains. De là, le tango a gagné les guinguettes et les dancings. Dès lors, cette musique et cette danse ont "pris" un peu partout. L'engouement des Européens a stupéfié les Argentins, qui, du coup, ont commencé à accepter le tango et à ne plus le tenir pour interdit. Le plus curieux est la façon dont les immigrants se sont approprié le tango ; il était toujours en vogue dans les maisons closes et les lieux marginaux, mais on s'est mis à le danser dans les associations d'immigrants – les "amicales" italiennes, grecques... – et, cette fois, les danseurs étaient des gens du peuple. L'oligarchie des grands propriétaires de bétail a été, elle aussi, gagnée par le tango et cela a entraîné la création d'écoles spécifiques pour que les filles de ces familles riches et détentrices du pouvoir apprennent à danser le tango.

Votre roman est écrit d'une prose très virtuose, qui joue sans cesse sur les changements de narrateurs, d'énonciateurs et de points de vue, vous passez d'une époque à l'autre et développez en parallèle deux grands cycles narratifs auxquels vous adjoignez des récits secondaires... Est-ce votre manière habituelle ou bien avez-vous expérimenté dans Tango une nouvelle façon d'écrire un roman ?
C'est habituel chez moi que d'adopter successivement le point de vue de plusieurs personnages – même si je conserve la troisième personne, je donne à voir le récit de plusieurs points de vues différents ; je me glisse dans un narrateur, puis dans un autre... et ainsi de suite. L'instance d'énonciation est comparable à l'objectif d'une caméra qui se déplace de façon à montrer divers angles d'une scène. Je trouve que ce procédé "multifocal" est celui qui convient le mieux pour raconter, comme c'est le cas dans Tango, une histoire qui implique de nombreux protagonistes, issus de surcroît de milieux sociaux, idéologiques, très divers et qui évoluent dans une société en pleine mutation, chargée de contradictions. Il y a, dans ce roman, un point de vue un peu à part : celui représenté par les voix venues de Tango, un paradis hors du temps où sont rassemblés les personnages de l'histoire après leur mort. Cela me permet d'offrir une sorte de "vue en surplomb" sur un récit qui joue sur deux temporalités, les trente premières années du XXe siècle, et l'époque actuelle ; les défunts conversent, et les bribes de leur conversation surviennent à des moments très précis du texte ; ces voix interrompent la narration selon certaines lois et elles ont, par rapport au déroulement du récit, un rôle équivalent à celui du Chœur dans le théâtre antique.
En fait ces voix venues de Tango proviennent d'un jeu auquel je me livrais en marge de la rédaction du roman : pour me détendre, je m'amusais à écrire ces échanges entre les personnages décédés. Puis j'ai réalisé que ces dialogues faisaient vraiment partie du roman. Alors je les ai conservés mais en les retravaillant et en les insérant dans le récit selon certaines lois de façon à leur donner un vrai rôle narratif. Faire parler les morts est un motif propre à la littérature fantastique – les tout premiers textes que j'ai écrits appartenaient à ce registre, je me suis ensuite intéressée davantage à l'Histoire, à la mémoire collective – mais ici, ces "morts" sont plutôt des avatars du narrateur que de vraies créatures de l'au-delà. Ces voix de personnages défunts sont comme un clin d’œil ludique au genre fantastique, un jeu que je me suis autorisée dans un roman réaliste – non seulement réaliste mais historique, basé sur des faits réels et des personnages authentiques. Comme j'ai interdit à mes personnages de vivre certaines choses par respect de la vraisemblance – par exemple certaines relations amoureuses étaient inconcevables dans le Buenos Aires du début du XXe siècle – j'ai eu l'idée de rassembler dans ce paradis, après leur mort, tous ceux d'entre eux qui dans le roman avaient vécu leur vie avec tout le courage qu'exige la passion du tango ; ils ont, à mes yeux, gagné le droit d'accéder à Tango, où règne la joie éternelle, où l'on peut danser le tango sans retenue et jouer du bandonéon sans s'arrêter....

Quelle est la part de réalité historique dans votre roman ?
Les membres des deux familles dont je raconte l'histoire sont fictifs ; je leur ai donné des noms fictifs pour ne pas avoir de problèmes avec telle ou telle famille de propriétaires terriens encore très puissante aujourd'hui. Mais ces deux familles ont été imaginées à partir de données avérées, les attitudes de leurs membres, leurs réactions, leurs comportements sont conformes à ceux qui avaient cours à l'époque où ils évoluent. Tous les événements historiques auxquels je fais référence dans le roman sont réels. En ce qui concerne les gens du tango, Juan Montès n'a pas existé mais les musiciens des divers orchestres dont il a fait partie, eux ont existé – ma créativité de romancière s'est juste amusée à recomposer ces orchestres... Quant à Rosa, la chanteuse, elle n'est pas un personnage historique mais une synthèse des premières chanteuses de tango. J'ai étroitement mêlé histoire et fiction, même lorsque des personnages authentiques interviennent – par exemple, quand je raconte qu'Isadora Duncan a dansé juste vêtue du drapeau argentin, ça s'est réellement passé, et ça a suscité un énorme scandale. Mais j'ai inventé de toutes pièces la scène où elle dîne avec les personnages de mon roman.

Pourquoi avoir interrompu l'évocation du passé aux années 1930 ?
Parce que 1930 est l'année du premier coup d'Etat militaire. C'est une période de très grande richesse, sur les plans économique et culturel. Il y a eu un gros afflux d'immigrants, venus de tous les coins du monde ou à peu près. Buenos Aires a beaucoup changé ; elle est devenue une véritable métropole, et le tango une sorte de symbole, qui allait accompagner pas à pas l'évolution de cette société très mélangée où les nouveaux arrivants devaient s'agréger aux créoles. Je précise qu'en Argentine, ce que recouvre le mot "créole" est assez compliqué. Le terme désigne, d'une façon générale, tous ceux qui sont installés dans le pays depuis longtemps. Mais il faut distinguer parmi eux les descendants des colons espagnols, et les Indiens. Or en Argentine, on ne parle jamais des Indiens en tant que "créoles", on les appelle "les gens de la province", ce qui ne veut rien dire ! Cela revient à nier la population indienne, ce qui est un énorme mensonge. Les deux familles dont je raconte l'histoire dans Tango – qui sont deux familles créoles, séparées socialement, si l'on veut, par le nombre de vaches que l'une possède et l'autre pas... – sont, elles aussi, marquées par cet afflux d'immigrants, à travers notamment les personnages d'Yvonne, la Française, et d'Igor, le Russe.

Vous évoquez le tango, les passes, les attitudes des danseurs avec une extrême précision – et beaucoup de finesse poétique. Vous allez jusqu'à faire du tango un personnage, un narrateur doué de parole. Cela semble témoigner d'une expérience de cette danse, de cette musique, très intime. Dansez-vous le tango ?
Oui – et avec beaucoup de plaisir ! Mais il n'a pas fait partie de ma jeunesse ni de mon adolescence – à cet âge-là, j'écoutais les Beatles (rires)... Pourtant il était là, bien présent, j'en entendais à la maison, par exemple il arrivait que mon père se mette à chanter un tango de temps en temps. Le tango appartient aux Argentins comme une tradition. Quand j'ai quitté le pays, à 16 ans, à l'occasion du traditionnel circuit sur le Vieux Continent, où l'on doit avoir "tout vu en deux mois"..., je me trouvais en Italie la première fois que j'ai entendu un tango en Europe, et cela m'a beaucoup émue même si cette musique ne faisait pas à proprement parler partie de mon univers musical à ce moment-là. Quelques années plus tard, je me suis jointe à des amies étrangères qui prenaient des cours de tango à Buenos Aires ; je suis allée voir comment ça se passait dans une milonga – c'est le nom donné aux lieux où l'on danse le tango – et je me suis rendu compte que les gens dansaient sans aucune nostalgie. J'ai alors commencé à m'intéresser au tango de façon assez "intellectuelle", je voulais comprendre ce qu'il signifiait sur le plan sociologique, connaître son histoire... etc. et le tango m'a littéralement prise. J'ai également été frappée par la diversité des gens qui dansaient, avec un même enthousiasme. Puis à une période où je vivais en Espagne, je suis revenue à Buenos Aires et j'ai vu que le tango était devenu un vrai phénomène de mode : tout le monde le dansait, partout et toutes générations confondues... Je me suis dit qu'un tel engouement était forcément symptomatique d'un certain état social ; cela se passait deux ans environ avant la grande crise économique de 2001 – une crise d'une telle gravité que certains avaient pronostiqué la disparition pure et simple de l'Argentine en tant qu'Etat... – et la phrase qu'on entendait dans toutes les milongas était celle-ci : "C'est super, ici, on ne pense qu'à danser" – comme si pousser la porte d'une milonga signifiait que l'on déposait tous les problèmes à l'entrée... Cette volonté de fuir les problèmes a conduit à se mélanger des gens qui normalement ne se seraient jamais côtoyés. Et j'ai pensé qu'un phénomène analogue s'était produit dans les années 1910, 1912. Je suis convaincue qu'observer la façon dont on danse – et ce que l'on danse – apprend beaucoup sur une société donnée.

En termes d'écriture et de composition, la rédaction de votre roman a-t-elle été influencée surtout par votre expérience de cinéaste ou plutôt par le rythme du tango ?
Quand j'ai comparé tout à l'heure le narrateur à l'objectif d'une caméra, je ne pensais pas seulement à la façon dont Tango a été écrit – je pense que cette comparaison vaut sur un plan général. Quant à la musique, je m'étais effectivement posé comme défi de faire littéralement entendre le tango aux lecteurs par le truchement du phrasé de ma prose. Je voulais travailler celle-ci selon un rythme qui soit évocateur du tango de l'époque où je situais mon récit – une tâche d'autant plus délicate qu'en plus de la musicalité je voulais aussi transmette le mouvement des corps... De plus, les difficultés augmentaient parce que les gens dansent beaucoup dans le roman, et il me fallait à chaque fois essayer d'écrire les choses différemment (rires). Je pense être parvenue à donner à mon écriture un rythme qui suit la musique du tango, et à avoir rendu mon récit assez visuel – du moins je l'espère. J'espère également avoir réussi à communiquer cette idée que le tango est plus qu'une danse, plus qu'une musique : c'est une véritable façon de vivre. Je pense que s'il rassemble autant de gens par-delà leurs diversités culturelles et sociales, c'est à cause du rôle qu'il assigne à l'homme et à la femme ; quand ils dansent, il s'agit pour eux de "marcher ensemble", en harmonie – et c'est de cette façon que la plupart des couples, aujourd'hui, envisagent la vie commune. Les femmes ne sont plus astreintes à la seule obéissance à leur conjoint. Je ne suis pas d'accord avec ceux qui disent que le tango est macho : pour moi – c'est un avis personnel, pas une affirmation péremptoire... – le tango est avant tout quête d'harmonie entre l'homme et la femme qui le dansent.

Votre écriture est très virtuose ; cela a dû représenter un travail délicat pour le traducteur, Jean-Marie Saint-Lu...
Nous avons échangé beaucoup de courriels – il me contactait dès qu'il avait un doute sur tel ou tel mot, et me demandait beaucoup de précisions, notamment en ce qui concerne les figures du tango, pour lesquelles il faut user d'un vocabulaire très compliqué. Et je tâchais, alors, d'expliquer en espagnol à quel genre de figure correspondait tel ou tel mot. Outre le jargon propre au tango, l'autre difficulté du texte était de respecter les niveaux de langue de chaque personnage – sans oublier que le niveau de langue est aussi une question de circonstances, par exemple, vous n'emploierez pas forcément le même vocabulaire avec vos amis qu'avec votre tante d'un certain âge (rires). Bien que je me sois toujours efforcée d'employer les termes justes, j'ai évité le registre trop argotique – mais j'ai été très attentive à respecter les nuances de langage inhérentes aux origines géographiques des protagonistes : un Argentin d'origine italienne ne parlera pas le même espagnol qu'un Argentin d'origine française, ou espagnole. J'ai essayé de restituer ces subtilités de l'espagnol oral, mais la version française en a gommé la plupart.

Vous avez utilisé beaucoup de mots français dans le texte d'origine. Pourquoi ?
A l'époque où je situe mon roman, la culture française était si présente en Argentine que beaucoup de mots et d'expressions français passaient tels quels dans l'espagnol qui se parlait là-bas. Les étudiants en médecine avaient même des cours entièrement dispensés en français, et les écrivains, tout en s'exprimant en espagnol, avaient tendance à truffer leurs textes de mots français. Mais ce n'était pas du snobisme culturel ; c'était juste l'état linguistique de la période – un état de langue qu'un personnage comme Yvonne, une Française de souche mais qui est une fille simple, a du mal à comprendre. Les mots français faisaient donc partie intégrante de la langue ; ils n'avaient pas le statut de mots étrangers et c'est pourquoi je ne voulais pas qu'ils apparaissent en italiques dans le texte originel – cela a d'ailleurs occasionné de longues discussions avec l'éditeur espagnol. Dans le texte français, il a fallu recourir à l'italique pour marquer ces mots français inclus dans l'espagnol ambiant et, du coup, la fusion linguistique n'est plus apparente. Mais de toute façon, elle ne serait pas davantage apparu si on avait gardé les caractères romains pour l'ensemble du texte...

Vous spécifiez, à la fin du livre, qu'il a été écrit alors que vous étiez en résidence à la Villa Mont-Noir. Vous êtes donc arrivée là-bas avec toutes vos informations, de façon à n'avoir plus qu'à écrire le roman ?
C'est cela. Là-bas, je n'ai travaillé qu'au roman proprement dit. Les recherches préalables ont été faites à Buenos Aires, à Madrid, à Paris... je me suis beaucoup déplacée. Une fois les informations accumulées, j'ai trouvé très agréable d'être à la campagne, dans le calme et le silence, pour écrire. Le silence ambiant était très important : il me mettait à l'abri des contaminations linguistiques, et je pouvais davantage être à l'écoute de la langue de chaque personnage – ce qui m'était difficile à Paris, par exemple, parce que je baignais dans le français, ou même à Madrid, car l'espagnol n'y est pas le même qu'à Buenos Aires.

Maintenant que ce livre est publié, comment vivez-vous "l'après-Tango" ?
Quand j'ai eu fini Tango, je me suis presque aussitôt engagée dans un autre projet romanesque, sur lequel je travaille encore actuellement. Depuis que j'ai achevé Tango, je redécouvre le plaisir de danser ; je peux jouir du tango de façon beaucoup plus naïve. En fait, j'ai été dans l'incapacité de danser pendant toute la période que j'ai consacrée à ce livre : je sentais que je devais m'abstenir de danser de façon à rester fidèle à mes personnages et, surtout, à l'époque dans laquelle je devais m'immerger pour écrire juste.

Pourrait-on dire que danser à nouveau le tango est pour vous une façon de revenir au monde ?
Oui, c'est un peu ça... disons que je peux à nouveau vivre le tango de façon plus légère, comme n'importe quel amateur – et c'est un bonheur parce que j'adore danser le tango !



Propos recueillis par Isabelle Roche
Le 10 janvier 2007
dans le salon de l'hôtel d'Aubusson – 31 rue Dauphine – 75006 PARIS
Site de l'hôtel : www.hoteldaubusson.com

Vous pouvez aussi lire régulièrement des articles d'Isabelle Roche sur le site www.lelitteraire.com





Pour visiter le site
de l'auteur :
www.elsaosorio.com


Née à Buenos Aires en 1953, Elsa Osorio a écrit des scénarios pour le cinéma et la télévision.
Elle a obtenu plusieurs prix dont le Prix National de Littérature, le Prix du Journalisme d’Humour, le Prix Amnesty International et elle a été finaliste du prix Femina.






Vous pouvez lire
sur notre site
un article concernant :

Tango



Editions Métailié
492 pages, 22 €


www.editions-metailie.com



Traduit de l'espagnol
(Argentine)
par
Jean-Marie Saint-Lu








Son premier roman,
Luz ou le temps sauvage,
a été publié chez Métailié en 2000.







Quleques couvertures
des éditions étrangères :

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