Maïssa BEY

L'ombre d'un homme qui marche au soleil



J'ai entendu Maïssa Bey lire ce texte au Centre Beaubourg. J'ai vu des visages bouleversés ; et tout le public applaudir à tout rompre à la fin de son intervention, et j'en ai été profondément touchée.
Car en écoutant Maïssa je retrouvais mon père. Pas un écrivain célèbre, non, mon père, un être humain avec sa solitude, son courage et ses déchirements.
Et c'était une femme, algérienne, qui dans sa solitude et ses déchirements avait eu le courage d'une si lumineuse intelligence.
C'est pourquoi je ressens pour Maïssa Bey une fraternelle amitié.

(Extrait de la préface de Catherine Camus)

Maïssa Bey nous propose une rencontre avec Albert Camus, une analyse de son œuvre et une réflexion sur ses écrits et sa vie. Elle présente les proximités, la connivence, qu’elle a trouvées avec ce qu’exprime cet écrivain. Il l’a beaucoup marquée et elle partage avec nous ses réflexions, ses sentiments, ses analyses. Ce livre est sa lecture et son interprétation de Camus et il nous donne le goût de lire ou de relire cet auteur essentiel car elle nous parle de lui et de ses écrits avec beaucoup de passion.

Maïssa Bey évoque aussi sa difficulté d’être femme, algérienne de surcroît, objet de tant de clichés réducteurs qui a rendu encore plus difficile son intrusion dans ce que Faouzia Zouari, femme écrivain du Maghreb, désigne comme « le cercle des parlants ».

Le rapport au mensonge, au silence, à la vérité, à la mort transparaît dans les personnages d’Albert Camus avec notamment Meursault qui est un anti héros toujours confronté à la mort, celles des autres puis la sienne.

Maïssa Bey donne la parole à Albert Camus qui parle de sa mère : la première femme « désespérément aimée » celle qui, « avec tant de silence et d’ombre […] pouvait rester à la hauteur de n’importe quelle lumière. » Elle évoque l’angoisse sourde et continue à mesure qu’il avance dans l’écriture. Pour Camus « se sauver et sauver les autres par l’usage de la sincérité la plus simple et du mot le plus juste » existe avec la douleur et le déchirement d’une part dans l’impossibilité d’être vraiment soi-même et d’autre part dans l’impossibilité de consentir au mensonge. Camus voulait se situer publiquement par rapport à « ceux qui oppriment par la force, le mépris ou le mensonge. »

L’amour tient une place importance pour Albert Camus qui a eu quatre femmes qu’il a aimées en même temps, allant de l’une à l’autre, chiffre qui correspond exactement au nombre de femmes que peut épouser en toute légalité un homme dans la religion musulmane. Il a aimé beaucoup d’autres femmes et confie : « Nous désirons que l’amour dure et il ne dure pas. La possession totale d’un être, la communion absolue dans le temps entier de la vie est une impossible exigence. Aimer alors, c’est stériliser l’aimé. »

L’image qu’il donnait de lui était très importante pour Albert Camus : « J’en ai assez de vivre selon l’image que d’autres donnent de moi. Je décide l’autonomie. »

Beaucoup de facettes sont abordées dans ce livre avec des citations extraites de l’œuvre d’Albert Camus, des extraits d’interviews et des commentaires tout à fait judicieux de Maïssa Bey qui a publié de nombreux ouvrages dont plusieurs sont chroniqués sur ce cite et qui a co-fondé les éditions Chèvre-feuille étoilée et la revue Etoiles d’Encre.

Brigitte Aubonnet 
(04/06/08)    



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Chèvre Feuille Étoilée
100 pages - 5 €








Maïssa Bey
vit à Sidi Bel Abbes (Algérie), où elle se consacre à l'écriture.









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