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Bernard ASCAL

L’amateur de billes
et autres nouvelles grinçantes



Le lecteur qui plonge dans ce recueil sans connaître le travail de l’auteur a de quoi être surpris. Si ce lecteur est très cartésien, avec un goût prononcé pour le sérieux, le réalisme et le premier degré, il risque même d’être effaré. Bernard Ascal ne lésine pas sur la transgression et la morbidité.
Pourtant, le lecteur est prévenu par la couverture : « nouvelles grinçantes ». Mais qu’est-ce qui les fait grincer comme ça ? C’est vrai que l’auteur n’a pas pour mission de mettre de l’huile dans les rouages d’une société bureaucratique et d’un monde aux comportements aussi absurdes que consternants. Au contraire ! L’auteur amplifie les grincements, exagère, extrapole, au cas où certains ne les auraient pas suffisamment perçus.
Dans la préface, Claude Louis-Combet, prépare aussi le lecteur à ce qu’il va découvrir. « Tout se passe comme si, dans le sommeil qui précéda notre lecture, la terre avait tourné d'un cran, et lorsque, réveillés, nous entrons dans le vif du livre, c'est pour constater aussitôt que tout a empiré, les conditions de la vie sociale, la régulation politique du monde, le malaise de la conscience. » « Cependant, l'humour ne manque pas dans ce tableau de l'homme et du monde […] Il y a place pour un rire de fond, dans la mise en scène de situations cocasses, dans la maîtrise du farfelu et le jeu des exagérations et des extravagances. Sous un horizon qui, à la réflexion, porterait au désespoir métaphysique, le verbe du conteur ne défaille jamais. Le temps a beau être sombre, le plaisir reste entier. »

Dès la première nouvelle, le lecteur est confronté à une étrange histoire d’amputation pour échapper à de lourds impôts. Dans une autre nouvelles, le narrateur a vendu son corps en viager en touchant une mensualité pour chacun de ses organes. Ailleurs, on n’attend pas le décès de la donneuse pour opérer le prélèvement. Le thème des greffes et des transplantations revient aussi dans un texte rendant absurdes les causes et le déroulement d’une guerre. « Bien que le code des armées interdise formellement les greffes entre adversaires, la difficulté à procéder sur le champ de bataille au moindre contrôle, engendre une prolifération de transplantations d'ennemi à ennemi. À l'instant où j'écris, il est devenu impossible d'établir chez tel soldat ce qui justifie son appartenance à un camp plutôt qu'à l'autre. »

Toutes les nouvelles sont écrites à la première personne et les narrateurs sont entraînés dans des situations ubuesques certes, mais souvent poétiques et émouvantes. Comme cet homme trompant sa solitude avec une poupée qui le ramène à sa plus tendre enfance, ou cet amateur de billes qui se lance dans une collection démentielle pour échapper à une existence sans consistance, ou cet autre solitaire qui passe des heures dans les rayons d’un hypermarché…

Le rapport au corps et à la mort, l’homme et son mal-être face à une société toujours plus inquisitrice, la solitude et l’incompréhension des autres, c’est tout cela qui constitue le fil conducteur de ce recueil où la gravité n’empêche pas l’humour, ou l’absurde fait sourire mais aussi grincer des dents. « Nouvelles grinçantes », c’est vraiment une bonne formule.

Serge Cabrol 
(13/08/20)    



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Bernard ASCAL, L’amateur de billes
Rhubarbe

(Mai 2020)
112 pages - 13 €



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