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Krishna MONTEIRO


Ce qui n’existe plus


Après Lectures de prison, Le massicot, Le feuilleton, pour leur quatrième publication, les éditions Le Lampadaire publient encore un livre remarquable, Ce qui n'existe plus, petit recueil (une centaine de pages, j'adore les livres à l'écriture concise donc ciselée) de sept nouvelles, dont la première, qui porte le titre du recueil, a été finaliste du grand prix brésilien Jabuti en 2016.

Sept nouvelles qui sont des souvenirs d'un père, d’un grand-père, d'un chat qui raconte l’enterrement de son maître, d’un coq qui est dans l'arène où la « mission » d'une potière conteuse. Le narrateur change à chaque texte, mais est-ce bien certain ? Ne donne-t-il pas le change ? Ne se métamorphose-t-il pas ? En tout cas, cela forme un monde fantastique qui est comme une famille, au sens large du terme, rêvée.

Le narrateur de la deuxième nouvelle, Les croisements du Dr Rosa, écrit : « C'est peu avant de m'allonger définitivement sur le lit que je me rends compte que je n'habite plus dans cette pièce, mais à l'intérieur, entre les lignes du texte que lui, le médecin, m’a confié au sommet de la montagne. Je m’aperçois que recouvert, blotti, enveloppé dans la couverture de ces pages, j'habite désormais leur être, leur noyau, les mots. »

La dernière nouvelle, Une âme au travers du corps, se clôt et clôt le recueil par ces mots de la potière conteuse : « Demain lorsque cette séance sera terminée, lorsque vous qui composez mon auditoire serez partis, aurez la porte et ce livre, j'écrirai. »

À travers narrateurs et personnages, nous avons le spectacle d'un monde qui n'existe plus et pourtant bien là ou, comme le dit l’exergue de Monte Castello de Clarice Lispector, d'un monde qui n'a jamais existé. Il faudrait aussi citer l'exergue d'Un enclos fermé comme un rêve signé Jorge Luis Borges qui se termine ainsi : « Clos comme un rêve est ton domaine ».

Toutes ces nouvelles, ces souvenirs, ces animaux narrateurs forment un monde fantastique, baroque (sud-américain) qui nous happe et nous interpelle comme dans le beau et émouvant texte (le plus court, quatre pages) Le suaire : « Si j'étais toi, je lâcherais cette arme, je poserais ce revolver sur le sol, je jetterais par terre la balle en acier destinée à te détruire le crâne. Si j'étais toi, je courrais, je traverserais l’espace de la chambre... »

Une heureuse découverte que cet auteur publié pour la première fois en français.

Michel Lansade 
(18/08/20)    



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Krishna MONTEIRO, Ce qui n’existe plus
Le Lampadaire

(Février 2020)
104 pages - 10 €


Traduction du portugais
(Brésil)
Stéphane Chao




Krishna Monteiro,
né au Brésil en 1973,
est écrivain et diplomate.