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Maurice GOUIRAN


Et dire qu’il y a encore des cons
qui croient que la Terre est ronde !


Ce titre nous dit tout de suite que le style de Maurice Gouiran est de plus en plus "second degré" mais toujours d’actualité, comme ses thèmes, et, cerise sur le gâteau, toujours truffé d’expressions locales savoureuses !

C’est donc un nouveau régal que de retrouver son héros, Clovis Narrigou, journaliste, qui s’adresse à nous ainsi : « Lorsque le besoin d’argent se fait sentir, je fais travailler mes méninges pour trouver des idées de reportage à proposer à d’anciennes connaissances devenues – par la magie de leur talent, l’opiniâtreté de leurs ambitions ou simplement leur ancienneté – rédacteurs en chef de journaux ou de revues. »

Mais rien que de le voir descendre de sa montagne pour offrir ses services (compétences et bonnes idées comprises) à sa camarade – et plus si affinités – "fliquette", Emma Govgaline, est encore un plaisir qu’il peut nous faire partager.

Dès le début du roman, Clovis nous fait ce clin d’œil à propos des marchés de Provence : « exit donc l’estragon et la belle échalote, le joli poisson de la Marie-Charlotte, c’est tout juste si l’on perçoit çà et là, en tendant bien l’oreille, l’accent qui se promène et qui n’en finit pas. »
Ainsi pour les plus de 30 (ou 40 ans !?) c’est évidemment cette chanson de Gilbert Bécaud qui nous chatouille l’oreille, et qui rendra ces images d’autant plus vivantes ! 

À cause du manque de moyens dont dispose la police, et du caractère de son chef qui préfère sa réputation – « On l’avait longuement interviewé, il avait plastronné devant les caméras. La télé c’était quand même le nec plus ultra non ? » – à une enquête plus approfondie, il faudra bien que la capitaine Govgaline ait recours, de sa propre initiative, à l’aide de Clovis !

Car il vient de se passer de drôles de choses sur ce fameux marché : « Lorsque Claudette Espatouffier s’abattit, les bras en croix sur l’étalage de sa baraque à santons. » Etil ne s’agit que de la première victime, car ensuite on en décomptera cinq en tout, dont trois hommes étrangers (un Américains et deux Russes) qui participaient à un colloque sur la « vérité historique de la Seconde Guerre mondiale ».

Alors est-ce la composante "complotiste" de ces journées qui aurait produit ces réactions meurtrières ? Est-ce un attentat commis par Daech ? C’est en tout cas ce que vont essayer de comprendre ou de décrypter notre policière, et surtout Clovis, qui va interpeller ses relations de journaliste et également s’entretenir avec les organisateurs, sous le prétexte de faire un article sur ces fameuses journées, interrompues par les assassinats.

Mais sont-ils liés à d’autres faits ou préoccupations ? Lesquels en cacheraient d’autres ? D’autant plus que l’équipe d’Emma n’a toujours pas trouvé d’où venaient les coups de feu tirés simultanément. Ni pourquoi, ni par qui !

Et puis, on apprend qu’au même moment plusieurs paquets de drogue sont retrouvés sur les plages du littoral. « Au matin du 4 décembre les statistiques officielles faisaient état de 186 paquets d’environ 5 kg chacun. » « Alors même s’ils n’étaient pas fortiches en calcul mental ni experts de la règle de trois, les petits mariolles devinaient le fructueux rapport d’un paquet de cinq kilos ». C’est, en tout cas, ce que nous laisseentendre Clovis !

Après avoir autorisé un de ses lieutenants à rejoindre le service qui s’occupe de l’enquête sur les paquets de drogue échoués, Emma de son côté va voir Forrester l’organisateur de ces fameuses journées pour constater dans les thématiques programmées « un patchwork de révélations sur des secrets ténébreux et des énigmes sibyllines. On y croisait même les extra- terrestres qui auraient apporté leur technologie aux nazis, des soucoupes volantes, des êtres démoniaques. » Elle sera tentée de penser ainsi : « La logique de Forrester ne s’inscrivait-elle pas dans un retour de cette mouvance très prisée par l’extrême droite ? »

Donc, du travail, des recherches à faire, des pressions à écarter, mais heureusement, il y a aussi Clovis, son aide, sa complicité (toujours, et plus, si…) et l’apport pertinent et précieux de ses recherches et conclusions !

Et c’est bien ainsi que nous aimons retrouver la verve méditerranéenne des romans de Maurice Gouiran. Mais ici, encore, pas seulement. Car une fois de plus, si des thèmes bien actuels sont abordés et analysés avec pertinence et recul, et si l’humour se glisse çà et là, c’est toujours une combinaison équilibrée, et de plus, derrière la fiction, se découvre une certaine réalité.
Car la construction est sérieuse, habile, avec ses respirations opportunes.  
Depuis les sons entendus au début du roman, après avoir senti les odeurs, laissons-nous apprécier et deviner la garrigue, et la mer, avec l’écriture de Maurice Gouiran, et bien sûr, « avé l’accent qui se promène… »

À noter que le roman se déroule sur la période du 4 au14 décembre, avec un épilogue, six mois plus tard… Mais çà…

Anne-Marie Boisson 
(06/04/22)    



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Noir & polar











Jigal
(Février 2022)
256 pages - 18,50 €










Maurice Gouiran,

auteur d'une bonne trentaine de romans, voit désormais ses livres sélectionnés dans la plupart des prix du Polar.

Bio-bibliographie
de Maurice Gouiran
sur wikipédia








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