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Dessin de Topor

Claude CHANAUD


Chroniques gaillardes de Bourg-en-Brenne






Si Tartuffe avait tenté de s’immiscer chez lui, l’auteur de ces chroniques n’aurait pas tardé à le foutre à la porte. Et pour cause : depuis ses premiers émois adolescents, Claude Chanaud a compris que tout le monde avait un sexe, quand bien même on tenterait de le domestiquer sous une chasuble. Certes, il n’y a pas que le cul dans la vie, mais une vie sans cul ressemble à un repas sans sel : on a beau manger, on sent bien qu’il y manque quelque chose. Ce sel de la vie, Claude Chanaud nous le restitue avec un talent certain dans ses Chroniques gaillardes de Bourg-en-Brenne.

Qu’est-ce que la Brenne ? Un petit coin de France, situé aux confins du Berry, de la Touraine et du Poitou, dont Le Blanc est le chef-lieu. Mais n’allez pas croire que Claude Chanaud écrit un livre « régionaliste » : les Brennous parlent français comme vous et moi ; et, à l’inverse des Basques ou des Bretons, ils ne cherchent pas à péter plus haut que leur chef-lieu. Du reste, Alexandre Vialatte adorait l’Auvergne, il revenait souvent dans son pays, mais je ne me souviens pas qu’on l’ait étiqueté comme écrivain auvergnat.

En fait, la Brenne est partout et nulle part : c’est un territoire nostalgique, où le Curé, le Maire et l’Instit’ dansent une drôle de sarabande dont le dénominateur commun pourrait se résumer en un seul mot : l’hypocrisie. Très tôt, à une époque où le portrait de Pétain trônait dans les écoles à côté de la Vierge Marie, le jeune Chanaud a deviné combien le monde des adultes cachait l’essentiel aux enfants en croyant leur faire du bien. Très tôt, il s’est rendu compte qu’il ne serait jamais un bon chrétien confit de dévotion et qu’il valait mieux prendre la vie par le bon bout : qu’il s’agisse de son propre membre ou de jeunes tétons éclosant sous des robes de cotonnade.

Education sentimentale, autobiographie intellectuelle et sensuelle, il y a un peu de tout ça dans ces quinze chroniques qui fleurent bon le Sauvignon et le parfum musqué des aisselles paysannes. On retiendra en particulier l’épisode de la première communion, qui donne lieu à deux pages hilarantes sur la pétomanie involontaire d’un communiant zélé ; la rencontre avec Béatrice, à l’occasion des battages, où le jeune Claude découvrira combien le foin s’adoucit au contact d’une belle paire de fesses ; la figure de Gaby, pauvre boucher pathétique, cocufié par sa femme et l’invasion des supermarchés.

Si Claude Chanaud avait trois pères spirituels, ce serait Marcel Aymé, Antoine Blondin et Jean Carmet, trois vilains petits canards qui auront toujours fait la nique aux donneurs de leçons, qu’ils soient laïques ou encuretonnés. En lisant ces chroniques, on pense au Marcel Aymé de La Jument verte, au Blondin de L’Europe buissonnière et au Carmet capable de disserter pendant des heures sur ces vins de soif qui donnent couleur et vigueur à l’amitié.

Profitons en aussi pour saluer Le Bruit des autres, qui offre une fois de plus à ses lecteurs un livre comme on les aime : couverture dépouillée et papier bouffant, avec en prime un charmant dessin de feu Roland Topor, dézingueur rigolard de nos tartufferies sociales et intimes.

Pascal Hérault 
(24/08/09)    
Pour visiter le blog de Pascal Hérault : http://pascalherault.blogspot.com



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Ed. Le bruit des autres

192 pages, 17 €








Claude Chanaud

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