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Keigo HIGASHINO


Les sept divinités du bonheur


Certes, il y a les évènements, les situations à suspense, ainsi que les peintures du Japon actuel comme les interrogations de certains protagonistes, héros de l’histoire ou non. Mais il y a surtout cette manière qu’a l’auteur de nous surprendre et de nous attraper page après page, mine de rien. Alors qu’à première vue, ces pages ne semblent pas dévoiler autre chose que la recherche de précisions à propos des circonstances. Cet auteur en tenant ainsi en haleine ses lecteurs, partage avec eux hypothèses et analyses qui vont les faire s’interroger sur les personnages. Ainsi il glissera çà et là, toujours naturellement, des éléments qui vont exciter notre envie de poursuivre la lecture !
Percevrons-nous à temps, cette progression qui nous amènera à saisir un élément déterminant ?

Un policier, en patrouille, aperçoit un individu qui titube, un couteau enfoncé dans sa poitrine. On apprend qu’il s’agit de l’homme d’affaires Aoyagi Takeaki. Ce dernier doit cacher quelque chose à sa famille car à la nouvelle de sa mort, celle-ci ne voit pas ce qu’il faisait dans ce quartier éloigné de son travail comme de son domicile. Il s’agit du quartier des affaires et du fameux pont de Nihonbashi. « Construit en Meiji 44, c’est-à-dire en 1911, classé bien culturel important […] le pont était le point d’origine des routes du Japon sur lesquelles les commerçants suaient sang et eau. »

 Une cellule d’enquête est créée avec à sa tête l’inspecteur Kaga, qui trouve les premières conclusions un peu rapides, voire trop faciles.
Le fils aîné de la victime, Yùto, en essayant de mieux connaître son père va se lancer dans certaines démarches.
Le portefeuille d’Aoyagi est trouvé sur un suspect qui aurait pu vouloir se venger de lui. « À cause de ces séquelles, M. Yashima n’arrivait pas à retrouver du travail, n’est-ce pas ? » demande une journaliste à sa femme. Mais ce dernier est victime d’un accident qui le laisse dans le coma. De toute façon, le commissaire n’est pas certain que cet homme soit coupable de l’agression. Et l’enquête se poursuit…

Nous découvrirons alors la teneur des liens familiaux et connaîtrons des personnes proches des deux victimes.
Avec aussi ce que l’on suppose être des éclairages, qui pourraient progressivement nous amener à mieux comprendre, ou bien à cerner les différentes options. Mais l’habileté tout en finesse de l’auteur, nous laisse nous imprégner de l’atmosphère et, ainsi, saisir les relations délicates, voire complexes entre les protagonistes. En cela nous suivrons pas à pas cet inspecteur au cours de ses découvertes, et analyses, vraies ou fausses, jusqu’à ce qu’un élément vienne bousculer l’ensemble et subtilement nous interroger… 

On a constaté qu’une personne venait depuis un certain temps déposer des grues en papier dans le sanctuaire. « Cela arrive environ une fois par mois. Elles sont posées sur le coffre à offrandes accompagnées d’une enveloppe blanche qui contient un billet de 1000 yens, sur laquelle est écrit : "Pour les faire brûler". »
Comme le pense l’inspecteur Kaga, « savoir qu’Aoyagi faisait des grues en papier dont il se servait pendant ses pèlerinages aux Sept divinités du bonheur était une clé pour résoudre l’énigme. »

Un jour, arrivé au milieu du pont, « l’inspecteur Kaga fit une nouvelle pause. Juste à côté des statues de qilin ailés qu’il contempla longuement.
– Le devoir des vivants est de recueillir le message des mourants...
À peine avait-il murmuré cela qu’il ouvrit grands les yeux. »

Alors un basculement ? Une intuition qu’il faut vérifier ?
L’art de Keigo Higashino consiste à nous obliger à suivre les méandres des déductions et des découvertes du commissaire et en parallèle nous questionner quant aux indices trouvés.
Le rythme de ce roman est le résultat de cette habileté virtuose dans la construction et dans les circonvolutions d’une pensée autonome. Cela ne peut que nous ravir !

Anne-Marie Boisson 
(23/11/22)    



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Noir & polar








Actes Noirs
(Septembre 2022)
304 pages - 23,50 €

Babel
(Juin 2024)
304 pages - 8,90 €


Traduit du japonais par
Sophie REFLE




Keigo Higashino,

né en 1958 à Osaka,
est l'auteur de nombreux romans policiers qui connaissent un succès considérable.



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