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Philippe CLAUDEL

Un monde de fous !


Voilà un recueil de textes qui reprend en grande partie des articles parus dans les magazines Le 1 et Zadig. Ce sont des textes très littéraires sur des problèmes de société : l’homme objet jetable comme la société qu’il a créée, la vie difficile quand on est smicard ou retraité, le télétravail à la maison avec des enfants qui interfèrent tout le temps, les migrants qui ont pour seul objectif d’atteindre le Royaume Uni, la pollution et la destruction de la planète terre, l’équilibre difficile entre liberté et sécurité, un monde imaginaire où regarder l’autre serait interdit…
« LE MAGISTRAT : Je ne crois rien. Je note simplement que vous avouez avoir regardé la plaignante de longues minutes, en dépit de la loi, et sans lui demander une seule seconde si votre regard la gênait, si elle vous autorisait à la regarder, ce qui de toute façon n'aurait pu avoir lieu que dans la sphère privée et aucunement dans un espace public comme une rame de métro, vous le savez bien. D'ailleurs, il ne vous est même pas venu à l'idée de lui adresser une demande ? »

Ces thèmes nous concernent tous et nous renvoient à nos responsabilités collectives et individuelles.
« Ainsi nous trouvons-nous face à un dilemme : devons-nous préférer une inquiétude grandissante à une restriction de nos libertés, ou devons-nous choisir de maîtriser notre inquiétude au prix de l'abandon de certaines de nos libertés ? Mais est-ce vraiment demeurer libre que d'être sujet à une permanente et forte inquiétude ? La première des limites à nos libertés n'est-elle pas cette peur même qui nous empêche d'en jouir ? »

Ils mettent aussi en évidence toutes nos contradictions : « Il y a une hypocrisie farouche à vouloir imposer la civilisation consumériste sur la planète entière et à rejeter à la mer des migrants dont nous acceptons qu'ils rêvent de nos produits, mais pas qu'ils viennent participer au système qui les exploite en s'asseyant à la table du banquet. »

Le dernier texte est une nouvelle glaçante sur le problème de la violence qui rejoint la pathologie car cela montre de façon terrifiante que même notre voisin peut être une menace sans que nous nous en doutions. « Il savait le couteau sous son oreiller et cela lui procurait une grande sérénité. Une forme de bien-être qu'il ne connaissait pas. Il le prit dans la main, déploya sa lame. Il le tendit devant lui. Un éclat de lune tomba sur le tranchant de métal. Il se leva. Il lui fallait marcher. Le dortoir était paisible. Il passa entre les lits. Il avançait pieds nus, silencieux. Ses camarades dormaient parfois dans des positions étranges, le corps vrillé en d'incroyables torsions, les couvertures et les draps rejetés sur leurs pieds comme s'ils venaient de se battre. »
Dans la crise sanitaire qui envahit nos vies, où le danger peut venir de l’autre, voisin, ami ou membre de la famille, avec aussi les problèmes de violence et de terrorisme, comment allons-nous surmonter ces dysfonctionnements qui perturbent toutes les relations humaines et fragilisent les démocraties ?

La nouvelle de Philippe Claudel, Le voisin, est dérangeante et nous interroge, en mêlant la pathologie individuelle et le terrorisme. C’est malheureusement un thème d’actualité après l’assassinat de Samuel Paty.

Ce recueil dénonce les dérives et le mal-être de notre société.

Brigitte Aubonnet 
(18/12/20)    



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Lectures




Editions de l'Aube

(Octobre 2020)
200 pages - 15,90 €




Philippe Claudel,
né en 1962, écrivain et réalisateur, a publié une trentaine de livres et obtenu de nombreux prix littéraires dont le Renaudot en 2003 et le Goncourt des lycéens en 2007. Il est membre de l’Académie Goncourt depuis 2012.


Bio-bibliographie sur
Wikipédia


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