"Skolig al Louarn (petite école du renard) est une expression bretonne désignant l'école buissonnière."

L'école buissonnière peut mener à écrire de la poésie, à prendre le temps de vivre, d'être attentif aux autres, d'observer la nature…

Ahmed Kalouaz de son écriture poétique et chargée d'humanité retrace son entrée en écriture. Il nous parle de son adolescence, de sa rencontre étonnante avec Alain Mimoun : Ma foulée est celle de Mimoun, je le devine d'instinct, et même si ce n'est pas vrai, à cause de mes origines, on m'assimile toujours à lui. Je cours et j'écris des phrases qui disparaitront avec le temps. Sauf une, restée je ne sais par quel miracle, dans un coin de ma tête. "La poésie c'est le réflexe qui me colle à la peau, c'est l'accent circonflexe qui me sert de chapeau."

Ahmed Kalouaz rencontrera aussi Pierre Mendès France : Au cours de l'échange, j'essaie de faire bonne figure, m'exprimant avec des mots précis, gommant le langage des barres d'immeuble, mâtiné de gitan et d'italien, même si mes doléances ne traduisent pas forcément les préoccupations de mes copains de la cité. Il écoute calmement ce que j'ai préparé, mon carnet habituellement réservé aux poèmes, devenu pour l'occasion un cahier de revendications.

Ahmed Kalouaz a cette force, cette volonté de s'engager, de vivre qu'il transmet dans ses écrits et dans le partage qui lui est nécessaire : Mais j'ai appris pour toujours que l'écriture devenait objet d'échange uniquement si elle parlait à l'autre. J'ai compris là, je crois, que ces mots prononcés devaient, pour devenir efficaces, être ceux que les autres ressentaient. En récitant mes textes, je dis au spectateur : "Dans les phrases portées par ma voix, c'est de toi que je parle."

Ahmed Kalouaz explore ses souvenirs personnels et ses rencontres réelles ou virtuelles avec différentes personnalités du sport, du monde politique ou artistique et le rôle qu'elles ont pu jouer dans son parcours.
Il a ainsi croisé Albert Batteux, Emil Zátopek, Martin Luther King, Otis Redding, Léo Ferré, Jean Ferrat, Albert Cohen, Yves Gibeau, Bob Beamon, Le Larousse, Colette Magny, Victor Hugo…
Il évoque aussi la mémoire familiale qui rejoint la mémoire collective de tous ces déracinés venus combattre et travailler en France alors qu'ils étaient nés de l'autre côté de la Méditerranée.

Un très beau voyage, un excellent moment de littérature et d'humanité avec Ahmed Kalouaz comme guide poétique.

Brigitte Aubonnet 
(20/05/13)