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Cathy YTAK


Ce soir je le fais / Ce soir je le quitte



Deux textes recto-verso en boomerang :
Dans le premier, Simon, le beau gosse de seize ans d’à peine plus d’un mètre soixante-dix, craque pour Méline, la jeune fille métisse de dix-neuf ans « balancée comme un joueur de rugby gallois » d’un mètre soixante-dix-neuf. Ils sont tous deux invités chez Emma, son amie de toujours, pour son anniversaire et Méline lui a envoyé ce message « Si tu ne viens pas chez Emma ce soir, moi non plus.». La porte ouverte à Simon pour se déclarer et passer à l’acte. L’adolescent anxieux passe une heure à se préparer, ses parents complices et « super cool » se gardant bien du moindre commentaire, et alors que la fête a déjà commencé, il débarque enfin. Il s’y affirme, selon son d’habitude, comme le roi de la danse ; l’alcool coule à flot et si son show sur son morceau favori tourne en catastrophe, ça ne l’empêche pas de tourner la prestation à son avantage. Emma a changé les draps de la chambre et en a informé Simon et Meline. Méline le regarde fixement. C’est à eux maintenant de concrétiser ou non...
Au verso, Emma. Elle est tendue: il lui a fallu convaincre ses parents de lui abandonner la maison pour la fête et même si Adrien qui ne boit pas lui a promis d’assurer la musique et l’intendance durant la soirée, elle se doit de rester vigilante. Mais surtout elle décidé d’annoncer ce soir à Loïc, avec lequel elle est depuis plusieurs mois, la fin de leur histoire, « Parce qu’avec toi, j’ai dû louper une marche. On n’est pas passé par la marche amour. On est allé direct au lit », et ne sait comment  le lui dire. Et si lui était vraiment amoureux ? Elle découvre que la première rupture s’avère une étape tout aussi anxiogène et décisive que la découverte des ébats sexuels.
Adrien celui qui aime les garçons et ne quitte pas Simon des yeux, Clémentine, Laure et les autres dansent, se guettent, se défoulent ou s’étreignent sur le canapé...
Une chute astucieuse réunit les deux textes et ferme élégamment la boucle.

Ce ne sont pas deux récits indépendants mais la même soirée considérée selon deux points de vue différents. Le dispositif est ingénieux et Cathy Ytak y confirme, si besoin était, la connaissance fine et profonde de l’adolescence qui est la sienne. Elle y dit magistralement et avec sensibilité les premières fois pleines d’hésitations et de doutes, la rage du désir et l’urgence des sentiments. Elle y met en scène dans l’intimité de ses personnages la complexité des émois des cœurs, la tornade et l’ivresse des corps, la pudeur, les tâtonnements et le vertige dans la nuit, la musique et les vapeurs d’alcool. S’y esquissent aussi des déceptions, de petites défaites et beaucoup de doutes et d’errances. 
Au fur et à mesure de la soirée les longues phrases introspectives ou descriptives font place à des   pensées et des propos plus bruts, parfois elliptiques et brumeux, oscillant entre désirs et frustrations sur fond d’ivresse parfois et exprimés de façon plus hachée. L’« Imagination [est] en berne », « Tant pis, c’était pas prévu au programme. »  
Dans ces deux textes, en contrepoint, l’amitié et la tendresse font ancrage et refuge tandis que mille questions s’agitent et tournent en rond dans la tête de ces adultes encore en devenir.

Un texte dual littéralement habité par ses personnages qui, loin des récits et films sentimentaux mièvres et convenus, ose aborder ces élans du corps qui ne concordent pas forcément avec ceux du cœur, qui distingue de façon moderne amour et plaisir.
Il y a beaucoup de finesse, de respect et de justesse dans la restitution de ce tourbillon de désirs et d'amours adolescentes et si ces récits pleins d’émotions toucheront à coup sûr les-ados, ils  pourraient trouver aussi un accueil favorable auprès des parents qui souhaiteraient par la lecture accompagner l’éducation sentimentale de leurs enfants.

Cathy Ytak s’y entend de façon subtile et vraie à dire l’adolescence, nous la rappeler, et à incarner les premières fois en toute simplicité et de façon universelle avec une empathie et un savoir-faire particulier qui courent avec bonheur d’un livre à l’autre. Elle nous offre là un futur best-seller des CDI et on s’en réjouit. 

Dominique Baillon-Lalande 
(19/12/18)    



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Jeunesse




Le Rouergue

Boomerang / doado
64pages - 8,50 €








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